Let us meet with smile | ft. Shogo

Let us meet with smile.

With @Dorian Parker

Shogo s’était massé les yeux, allongé sur son canapé défoncé, sa main libre tenant une cigarette qui se consumait toute seule. Il était épuisé, la semaine avait été terrible, et ce qu’il venait de se produire n’avait pas arrangé les choses. Il avait finalement laissé retomber sa main, son regard se posant sur le sceau encore rempli d’eau rougeoyante. C’était qu’un avant bras, ça dégoulinait pas mal, et avec sa petite séance artistique, il fallait avouer qu’il avait quelque peu poussé le trait. Il accusait la fatigue pour son geste, quand il aurait pu simplement avouer qu’il avait de sérieux problèmes… Il avait soupiré et s’était redressé, écrasant la cigarette à peine fumée dans un cendrier déjà dégueulant. Il avait roulé des yeux, et s’était levé en jurant, dos en vrac depuis des années maintenant, même pas uniquement à cause d’un certain affrontement auquel il préférait ne pas penser. Il avait récupéré le sceau, allant vider le contenu dans les toilettes avant de tirer la chasse et s’était un peu penché en arrière pour regarder son sol d’un air las. Il y avait encore quelques traces, et probablement que l’autre en partant avait du faire le petit poucet du glauque sur tout son chemin. Cela dit, il était en bordure du Sud, ce n’était pas comme si ici, qui que ce soit allait réellement faire attention à ce genre de choses. Il était épuisé oui, par la simple perspective de la nuit qu’il allait passer. Un peu plus tôt, alors qu’il avait, pour une fois, décidé de se détendre et de lire un peu plutôt que de fomenter il ne savait quel plans sans aboutissements pour essayer de faire tomber Seraph. La seule journée du mois où il avait décidé que ce n’était pas la peine d’insister, et voilà qu’on avait décidé de venir lui chercher des noises. En soit, c’était aussi un peu de sa faute, à avoir oublié de verrouiller sa porte, bien trop pressé à l’idée de s’écrouler sur son canapé qui pourtant, n’avait pas grand chose d’accueillant si on y faisait bien attention. Il était propre, mais ancien, avait clairement beaucoup trop de vécu.  

Mais voilà, ce canapé, il lui avait tendu les bras à peine vingt minutes, qu’il avait vu un gus débarquer comme un boulet de canon dans son petit appartement. Plutôt habitué à la jouer fine, Shogo avait d’abord tenté une approche diplomatique, indiquant avec un faux sourire nerveux à l’homme qu’il avait dû se tromper de maison. Après tout, en connaissant ce qu’il était capable de faire, il doutait fortement que Seraph envoie un homme seul faire irruption sans la moindre discrétion chez lui, ou alors, il avait bien du souci à se faire concernant ce dernier. Cependant, l’homme avait plus l’air d’un idiot enragé que quelqu’un de compétent, et avait directement décidé de tenter de l’attaquer. Shogo avait mis à peine une seconde à le coincer dans sa toile, activant en premier lieu une déformation de la réalité qui avait donné l’impression à cet imbécile de perdre la vue, un coup de canne dans les tibias avait fait la suite, et Akumu n’avait eu qu’à le pousser pour le faire tomber au sol. Définitivement un abruti, qui braillait dans tous les sens, ne répondait pas à ses questions, si bien qu’il avait été obligé de le plonger dans un univers dont il se rappellerait toute sa vie. Des charognards et créatures dégoûtantes dans tous les sens, qui en voulaient à sa peau quoi qu’il fasse. Voilà où il l’avait balancé, dans un monde sauvage où même les arbres dévoilaient des rangées de dents pour essayer de le croquer. Il avait laissé à l’autre l’impression de temps réel, attendant seulement cinq minutes en faisant défiler des vidéos sur son téléphone, main posée sur le torse de son invité surprise. Le retour à la réalité avait semblé brutal, et Shogo l’avait réduit au silence d’une main sur la bouche, lui intimant que s’il ne voulait pas retourner voir les arbres mangeurs d’homme, il allait devoir arrêter de brailler, ce qui avait eu le don de le faire taire. Mais pas de tirer des informations claires. Tout ce que l’autre ne faisait que répéter, était qu’il ne faisait que ce qu’on lui demandait, panique qui semblait le prendre jusqu’au bout des tripes et qui n’avait fait qu’agacer le cauchemar ambulant qu’il était.

- D’accord, alors tu vas porter un message à ton boss de ma part.

L’ordre s’était fait dans un murmure, alors qu’il avait de nouveau plongé l’autre dans un cauchemar aux airs de réel, le temps de graver au couteau sur son bras un petit message aimable sans que ce dernier ne hurle comme un goret et gesticule dans tous les sens pour trois fois rien.


Pour lui, le message avait été plutôt clair. Qui que soit la personne qui envoyait cet imbécile devait savoir qu’il n’était nullement bon de venir le chercher jusque dans sa tanière, et que s’il envoyait un nouvel idiot chercher il ne savait quoi, alors les choses se passeraient autrement. Il l’avait donc laissé porter le message à son “maître” chien couinant et reniflant en passant le pas de la porte à deux doigts de s’écrouler. Cette fois, l’erreur n’avait pas été de nouveau commise, et le verrou avait été tourné. Shogo s’était ensuite chargé de nettoyer, puis de s’affaler de nouveau sur le canapé. Il savait ce qui l’attendait, une nuit désastreuse, où il irait lui-même goûter à son pouvoir, et encore, il ne l’avait pas utilisé très longtemps, cela devrait plutôt bien se passer… en théorie.

Voilà donc quelques heures plus tard, un sceau vide à la main, le regard blasé sur une tâche encore présente sur son carrelage trop blanc, et quelqu’un qui tapait à la porte. Il avait lâché le sceau, passé ses mains sur son visage et avait pris une grande inspiration. Est-ce que tout l’univers avait décidé soudainement de venir gâcher la seule journée qu’il avait décidé de s’accorder ?! Visiblement. En passant près de la tâche, il avait tiré le tapis non loin, en se disant qu’il allait probablement devoir finir par le jeter car probablement qu’il allait se mettre à empester sous peu. Un nouveau juron lui avait échappé, et il avait passé une main dans ses cheveux, canne de nouveau glissée dans l’autre pour aller ouvrir la porte. Il avait ouvert grand les yeux en les baissant sur le panier tendu et avait finalement relevé un regard interrogateur sur l’autre qui lui faisait don d’une introduction… Plutôt théâtrale ! Il avait de nouveau regardé le panier d’un air suspicieux, comme s’il s’attendait à tout moment à ce que les muffins ne décident de lui sauter à la gorge et avait finalement opté pour un sourire qui se voulait accueillant. Il n’était pas idiot, Shogo, et les deux évenements étaient bien trop rapprochés pour n’avoir aucun rapport. Il avait d’abord songé à faire comme s’il ne parlait pas anglais, usant parfois de cette technique un poil fourbe pour ne pas répondre quand il n’avait pas envie, après tout avec ses origines c’était plus que crédible. Mais bon, cela passait avec les marchands ambulants et autres joyeusetés, l’autre en face de lui n’était pas du même genre, il semblait même tout aussi fou que lui, s’il fallait être honnête. Il avait donc saisi le panier de sa main libre, remerciant d’un hochement de tête.

- Je vous en prie. Avait-il dit en s’effaçant du chemin, gardant constamment le regard sur le visage de l’autre. C’est… effectivement une surprise, que me vaut l’attention ?

Il était néanmoins sur la défensive, s’il savait bien une chose pour lui-même être de ce genre de dangereux, était qu’un sourire pouvait cacher la pire des menaces. Il avait repoussé la porte, la verrouillant à nouveau sans pourtant perdre l’autre du regard. Il avait déposé le panier sur le meuble le plus proche, s’en éloignant un peu dans le doute, pour finalement aller se positionner à distance respectable mais face à l’intrus, deux mains sur sa canne pour s’y appuyer.

- Merci pour les… gourmandises. Avait-il ronronné. Dois-je comprendre que vous êtes aussi amateur d’art ?

Let us meet with smile.

With @Dorian Parker

Shogo gardait le regard sur l’homme, dont l’attitude avait… de quoi laisser penseur. Il reniflait comme un animal, ne semblait pas plus perturbé que cela par la tâche encore au sol, et surtout, entrait comme si c’était habituel chez un parfait inconnu. S’il se considérait comme assez dérangé, il fallait être honnête avec soi-même, il se disait maintenant que l’autre devait l’être tout autant, si ce n’était pas plus. Les deux hommes s’étaient dévisagés un instant qui avait paru durer des heures, sans que rien n’en résulte. Shogo n’avait pas un début d’idée de qui était ce fou qui marmonnait seul, et n’avait pas non plus envie de savoir ce qui se produisait dans sa tête. Il était bien placé pour savoir que ce qui était mental devait le rester, autant à cause de ses propres pensées que par son pouvoir.

L’inconnu avait royalement ignoré sa question, et loin de s’en formaliser, Shogo avait juste songé que ce dernier n’avait définitivement aucun humour malgré son entrée en scène théâtrale. Ou alors que c’était lui, qui n’était pas clair ? Les deux cas étaient possibles, le fait était qu’il avait voulu provoquer une réaction en rapport à son joli dessin sur le bras de l’intrus relâché un peu plus tôt de son appartement, et à la tâche de sang au sol, mal nettoyée. Ce n’était pas bien grave en soit, cela réduisait simplement son intérêt pour celui qui se présentait maintenant devant lui. Car jusque là, son attitude avait eu le don d’attirer son attention, entre les muffins et la manière de se présenter, qui commençait à faiblir malgré le caractère improbable de ce qui était en train de se passer. Il l’avait néanmoins observé faire sa vie, enlever sa veste, dévoilant un débardeur bien trop propre pour l’allure qu’il donnait jusque là. Shogo avait froncé les sourcils, se demandant si en réalité, il n’avait pas fait un erreur en l’invitant de la sorte. En soit, il avait toujours trop tendance à se reposer sur le fait que son pouvoir lui permettait d’avoir le dessus sur la grande majorité des personnes qu’il rencontrait, cependant, il oubliait un peu trop facilement, certainement par manque d’habitude, qu’il y avait là dehors des personnes tout aussi, voir plus dangereuses que lui. Quelqu’un qui agissait comme l’autre le faisait était soit un idiot, soit quelqu’un avec de la puissance, parfois les deux, en réalité. Là était un des principaux problèmes de Shogo : la sensation de supériorité, toujours persuadé d’être le plus intelligent de la pièce, jusque là, cela s’était toujours avéré vrai… à son sens.

L’énergumène avait commencé à parler, et il avait haussé les épaules. Non, cela ne voulait pas dire qu’ils étaient amis, simplement qu’ils étaient probablement aussi dérangés l’un que l’autre, mais en un sens, cela aurait dû les rapprocher n’est-ce pas ? Il allait répondre mais soudain, l’homme s’était mouché dans sa main avant d’aller se laver frénétiquement les mains… et en lécher la paume. Bon, d’accord, ce type était plus que dérangé, il était complètement ravagé ! Cela avait eu le don de lui couper le sifflet, et lorsque l’autre avait demandé s’il n’avait pas faim, il avait jeté un coup d'œil peu convaincu au panier. Sans même parler de potentiel empoisonnement, ou même de goût discutable pour rester dans les classiques, il n’était pas certain d’avoir envie de goûter quelque chose de la part de quelqu’un qui se léchait les mains après les avoir lavées. Le fait était que ses questions n’en étaient pas réellement, et ça, Shogo le décelait bien. Ou alors, peut-être que c’était juste lui, qui avait l’habitude de tester les réactions des autres de manière aléatoire, et qui du coup se méfiait de ce qui pouvait se tramer. Il n’était pas question de savoir s’il avait réellement faim, ni de partager, mais simplement de voir s’il était prêt à faire la paix pour ce qui venait de se passer. Quoi qu’il en soit, il était strictement hors de question que ses lèvres approchent les pâtisseries, pour toutes les raisons évoquées plus tôt.

- Une forme olympique. Avait-il souligné en réponse au geste désignant sa fine silhouette. J’ai pour principe de ne jamais manger entre deux repas, et je déteste aller contre mes principes. Avait-il dit calmement. Mais j’apprécie particulièrement l’attention, et je peux te proposer un verre plutôt. Il s’était décalé pour aller ouvrir un de ses placards, toujours méfiant, sortant une bouteille de vin qui devait être là depuis des années, commençant le service dans deux verres récupérés à sécher sur le bord de l’évier. Une réconciliation… je m’attendais à ce que tu me présentes tes excuses, après tout, j’ai été agressé chez moi, je suis traumatisé. Le sarcasme se faisait clairement entendre, autant dans l’intonation qu’avec sa main dramatiquement posée sur son torse. Mais enfin, j’imagine que j’ai déjà rendu l’attention. Il s’était appuyé sur le plan de travail, poussant un des verres vers lui, l’autre dans sa main. Tu m’excuseras, je ne suis pas en mesure de porter les deux verres en même temps. Petit regard vers la canne, avant de lever son verre dans un geste qui demandait à trinquer. Navré si tu me trouves impoli, cela dit. Avait-il continué avec toujours ce petit sourire en coin. Je me rattraperai.

Il avait eu un sourire un peu plus avenant. Il avait volontairement essayé d’attirer l’attention de l’homme sur sa canne, essayer de se placer en position de faiblesse alors qu’en réalité… Il pouvait très bien se déplacer sans. Du moins, sur des distances raisonnables, c’était l’effort prolongé qui lui coûtait. Il détestait certains regards qu’on pouvait avoir sur lui à cause de ça, cependant il fallait avouer que pour faire croire à quelqu’un d’un poil stupide qu’on était pas un danger, c’était plutôt pratique. Le fait était que actuellement, ce n’était pas le message qu’il essayait de passer. Il attirait l’attention plutôt sur le “méfie toi de ce que tu vois pas”, puisque l’autre savait très bien qu’il n’était pas chez un simple citoyen sans défense mais bien quelqu’un capable de choses tordues et profondément mauvaises malgré son apparence inoffensive.

- Du coup… J’imagine qu’il y a eu plainte contre moi ? Avait-il demandé avec un léger sourire amusé. Poor poor thing…