(Max) Everybody knows the deal is rotten.

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L’enquête aurait pu rester purement journalistique, les drames causés par une substance assimilée aux drogues auraient pu demeurer le sujet d’un bête article, pour le LA Daily News et Anastasia aurait pu se contenter de remonter les informations à Seraph Inc mais elle n’est pas parvenue à rester inactive, à regarder les gens se détruire sans questionner. La façade de bienfaisance a encore une fois fissuré les contours du rêve d’idéal pour tremper les doigts dans le sang des innocents, pour une mascarade. Le sort des victimes indiffère l’opinion, les camés ne sont rien d’autre que des dommages collatéraux que l’on prétend aider mais contre lesquels il est difficile de doser la réaction. Leur dangerosité réelle contraste avec leur incapacité à gérer ces nouvelles facultés. Elle aussi, un jour, a dérapé. Elle aussi, elle a tué. Que serait-elle devenue si on l’avait neutralisée plutôt que protégé ?

Ainsi, la journaliste aux tenues impeccables, la jolie demoiselle au rouge à lèvres carmin et à la langue acérée a laissé place à la blonde en tenue colombe, les escarpins échangés contre les bottes compensées derrière un voile d’invisibilité. Elle a suivi les dealers, elle a cumulé autant d’informations que possible et s’est détournée du vendeur pour tracer les utilisateurs : ils sont toujours le danger imminent. C’est sans doute stupide de sa part, sachant combien elle tient à n’être que la main tendue des bas quartiers, l’héroïne des petits secteurs, des enfants dans la misère, des parents hurlant à la recherche de leur gamin kidnappé, paumé. Quelque chose l’inquiète. Quelque chose ronge le coeur de la métahumaine. Elle n’arrive pas à mettre le doigt dessus, les mots se refusent à former un sens sur le papier. Ca a la saveur du soufre, des cendres, d’un passé dont on se détache mal.

Hemera ne saurait dire combien de temps elle a alterné entre les zones d’ombre des bâtiments et les jeux de lumière pour ne pas attirer l’attention avant que la débâcle n’éclate. Une petite réunion entre amis inconséquents. Des gosses de riches en mal de sensations fortes prêts à se faire une virée sous influence. Les yeux hétérochromes se sont levés au ciel d’exaspération face aux risques pris pour quelques instants magiques. Il n’y a rien d’agréable à perdre la maîtrise de capacités dévastatrices mais de cela, ils ne peuvent rien savoir : ils ont l’image auréolée de gloire de l’écurie héroïque Seraph, les strass, les paillettes, l’argent et les filles faciles. Ils ont l’espoir de l’Humanité sous le nez et, comme n’importe quel jeune et immature, ils espèrent changer le monde, changer la trajectoire de leur avenir.

Les dés sont forcément pipés. La première détonation arrache un sursaut à la jeune femme encore cachée à l’angle de l’avenue, le regard balaye les deux voitures garées sur le bord, la musique couvrant en partie les conversations. Un jeune homme dans un état presque second repousse une petite blonde au carré, qui supplie de partager. Elle en a besoin. Le timbre lui électrocute le myocarde, lui fait rater un battement. Ils sont quatre, en tout. Elle ne cherche pas vraiment à pousser l’analyse, à déterminer qui a pris cette saloperie et qui est inoffensif parce qu’elle connaît la fille. Elle la connaît parce qu’elle a grandi avec. Le bouclier intérieur se dresse entre ses émotions et ses pensées, elle ne doit pas se laisser dévorer par la culpabilité, elle doit simplement stopper le carnage avant qu’ils ne blessent quelqu’un. Il a des flammes bleues sur les mains, le charmant brun, en extase devant le prodige. L’invisibilité laisse place à la cape illusoire, au mouvement fluide et lumineux qui fait virer ses yeux au gris cerclé de blancheur. « Eh ! Tout va bien ? » Non, évidemment que tout ne va pas bien, Hemera mais elle ne veut pas paraître hostile ni menaçante, elle ne veut pas provoquer une riposte instantanée, une fuite désordonnée mêlée de panique. « Oh putain ! » Quelle répartie. Elle a attiré son attention et celle des passants aussi, de l’autre côté de la rue, déjà sidérés par le petit Hadès en puissance qui n’a pas encore la présence d’esprit de paniquer devant son incapacité à stopper ce qui lui remonte le long des bras. « La lumière du Jour nous fait l’honneur de sa présence, c’est trop de privilège ! » raille la voix féminine. Garder son self control, feindre la distance. Elle les voit, les phalanges de Cornélia qui tremblent, les cernes sous les yeux, la jalousie qui lui bouffe les lèvres. « Vous ne devriez pas rester là, si quelque chose tourne mal, vous allez blesser des innocents. » Les mains sont placées devant elle, dans un geste apaisant, un signe tranquille, immobilité attentive. « Parce que vous en avez quelque chose à foutre, vous tous, de blesser des gens ? » Anastasia voudrait lui dire de la fermer, de rentrer à la maison, d’arrêter d’essayer d’être quelqu’un d’autre, sauf qu’Hemera ne se permet pas ce genre de familiarités, elle n’a pas de vie en dehors, rien d’intéressant à faire baver aux paparazzi.

Trop délire. L’exclamation précède la déflagration dans la voiture, l’essence en mauvaise mayonnaise avec l’inconnu qui vole à quelques mètres sur le bitume, rejeté par ses propres flammes, convulse presque sous le choc et le pouvoir. Le réflexe a été plus vite que la pensée, le projectile qui s’est dirigé vers elle est désintégré en plein vol avant de l’atteindre, les paumes levées dans le but de se protéger. Elle ne veut pas se battre, elle ne veut pas leur faire de mal, il doit être possible de négocier. Elle ne veut pas avoir à faire une démonstration qui changerait son relatif anonymat en visibilité.

Cornélia a reculé, tousse derrière la fumée, des coupures sur la joue. Et elle est là, comme une idiote, à ne pas parvenir à décider qui elle doit sortir de la zone en premier, qui est la menace principale. « Ca vous fait chier que n’importe qui puisse faire des trucs aussi dingues que vous autres, pas vrai ? » Le visage se penche légèrement sur le côté, perplexe, un sourcil haussé. Qu’ils lui parlent, même si c’est de la provocation, ça vaut mieux que toutes les attaques aléatoires sur les restaurants ou les banques. La drogue ne doit pas avoir un effet interminable. « Non. Ce qui me fait chier comme tu dis, c’est que vous mettiez tous votre sécurité en danger pour quelques minutes d’adrénaline. T’as l’impression que ton pote se sent bien, là ? Laissez-moi vous aider, il pourrait garder des séquelles. » « C’est le mensonge que tu racontes pour qu’on reste des insectes dans votre ombre ? »

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@Maximillian Grayson

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N'avait-il pas le droit à une courte halte ? Un petit repos du guerrier ? Un instant loin des flashs, des interventions, des obligations liées aux trop nombreux sponsors. Il n'avait rien demandé de plus qu'une courte pause, le temps de se rappeler que le monde n'est pas juste une éternelle bataille contre les criminels de la ville. Une course permanence visant à sauver autant de gens que possible. Et une bataille impossible à gagner contre les médias et les avis d'une bêtise crasse vomie par des bien-pensants inutiles et misérables tout juste bons à reprocher aux gens qui tentent d'agir et de bien faire qu'ils auraient probablement pu faire mieux s'ils avaient été à sa place ?

Aujourd'hui, Seraph Inc fêtait en grande pompe le début de la semaine qui célébrait la mort du tout puissant Atom. Et les choses s'étaient faites en toute grandiloquence. Des affiches gigantesques. Des promotions sur les comics, séries et films liés de près ou de loin à la conclusion macabre de la vie du héros qui avait permis à Seraph de retrouver un second souffle. Autant d'éléments qui ne faisaient que rappeler une fois encore au Defender un jour particulièrement désagréable de son existence. Le jour où il avait été contraint de tuer de ses mains pour la première fois.

À ses yeux, cet anniversaire n'était rien de plus que le rappel d'une sorte de parricide professionnel. Un traumatisme agité et exhibé par tous comme une gloire pimpante et formidable quand le dernier des Solars n'y voyait que la mort de quelqu'un qui lui était cher.

Alors ce jour-là, il n'avait simplement pas enfilé son costume. Il n'avait pas été s'irradier dans son petit solarium personnel afin de gorger son épiderme de nouveaux photons pour raviver plus encore sa perfection et corriger son humeur maussade.
Il s'était contenté de sortir de son perchoir de rêve, et d'essayer pour une fois, juste une petite fois d'être quelqu'un de vaguement normal.

Il avait envie de ne pas sembler soigné et parfait. Il avait envie de ne pas sourire à tout va, d'accepter qu'on le touche, qu'on pause à côté de lui, qu'on l'utilise comme un simple morceau de viande contre lequel on se trémousse pour prendre des photos. Il avait envie de pouvoir râler dans la rue. De tirer la gueule. De boire un café immonde de chez Seraph Coffee. Quelque chose chargé en mauvais sucre, en lait de piètre qualité, beaucoup trop chaud et sans doute un peu cancérigène aussi.
Et le voilà là, avec son gobelet de caféine XL, dans un Hoodie gris triste à pleurer, capuche repliée sur sa tignasse blonde, les yeux couverts d'une paire de rayban sous la visière de la casquette qui aidait elle aussi à masquer sa tignasse, à errer bêtement dans les rues. Et curieusement, même s'il était maussade et d'une humeur assez grognarde, il était heureux. Il était... Max. Le vrai Max. Il était quelqu'un de normal. Un grain de sable dans le désert Californien.

Son premier sourire de la journée, il l'avait eu en hélant un taxi, et en recevant en retour un doigt d'honneur d'anthologie. Le second quand, en se faisant bousculer par une étudiante qui portait un t-shirt We Love Defender, il s'était fait insulter de weirdo avec un air écoeuré sur le visage.

Et puis une chose en entraînant une autre, il s'était retrouvé au mauvais endroit au mauvais moment.  Downtown n'était pas toujours le petit paradis qu'on imaginait il faut dire, et voilà qu'au détour d'une rue il assistait à un drôle de manège. Il crut un instant être tombé face à une bande d'étudiants de la SUCLA occupés à essayer de shiner un peu en public et de se montrer. Il chercha des yeux des téléphones, ou même des caméras qu'utilisaient souvent les Wanna Be Heroes qui n'avaient rien compris à cette vie, mais il n'en trouva pas.

L'instant d'après, une apparition d'une blancheur immaculée attira l'attention de la foule de badauds, lui y compris. Alors c'était comme ça que les gens voyaient ce genre de situation hein ?
Il fut désarmé de voir que le premier réflexe de la majorité fut de brandir des téléphones pour immortaliser la scène. Pas même une petite esquisse d'instinct de survie. Un petit quelque chose pour redonner vaguement l'envie de croire que l'humanité avec une chance de poursuivre son chemin de l'évolution vers autre chose qu'un échec génétique cuisant, mais non. Rien. Pas un sursaut. Juste la bêtise moderne.

« Elle me rappelle un peu quelqu'un non ? »

La trentenaire qui filmait le fit taire d'un geste de la main. La jeune héroïne lança quelques mots. Max eut une petite grimace.

« La punchline d'introduction n'était pas si folle. – ...Arrêtez de me parler où j'appelle les flics... –... Pourquoi pas quelque chose genre... Hey, l'allumette, je sais que t'es tout feu tout flamme, mais j'vais t'éteindre... »

Weirdo, encore une fois. Max haussa les épaules, croisa les bras et joua un peu des épaules pour observer la scène sans être gêné par les autres spectateurs. C'est presque eux qui l'étonnaient le plus.

Il fallut qu'une voiture commence à valdinguer et se faire vaporiser pour que les gens commencent à paniquer et qu'on éloigne les enfants d'au moins... trois mètres en arrière. Sécurité oblige...
Max secoua la tête de gauche à droite.

« On s'en fout que certains gardent des séquelles » Brailla quelqu'un à sa gauche. Une dame, mère de famille avec un crucifix bien visible autour du cou. Ah, la fameuse bienveillance chrétienne... « Qu'ils aillent se faire foutre ces salopards de Boosthead ! » reprit une autre personne. « Défonce les ! Défonce les, vas y ! » Scandait la foule, quelques doigts d'honneurs fusant ici et là, que Max se surprit même un peu à imiter parce que c'était drôle de faire partie de la masse, dans le fond. D'être stupide comme un misérable humain. D'être... effectivement un insecte dans l'ombre des grands. Et il aimait la sensation d'être petit, et ridicule. Ici au moins, il n'y avait pas Atom et le souvenir de son regard horrifié quand il lui avait défoncer la trachée à la seule pression de ses pouces et qu'il l'avait regardé dans le blanc des yeux s'éteindre dans des râles affreux sous les hourras avant qu'il n'ait à porter le corps brisé de son mentor au travers d'une foule en liesse.
Cette fois, il était un peu la foule. Et il n'était certainement pas the Defender.

@Anastasia Weiss

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« On s'en fout que certains gardent des séquelles » Elle n’avait pas réalisé la foule agglutinée, jusque là. Quelques passants, oui, mais pas les spectateurs dans son dos, pas les braillards primaires et les téléphones braqués pour filmer. Elle n’était pas faite pour le spectacle, la mise en scène, elle ne voulait rien d’autre qu’éviter des drames, des morts inutiles. « Défonce les ! Défonce les, vas y ! » Décontenancée par la violence inouïe de ces mots face à une situation tragique, elle s’est tournée, la cape lumineuse s’effilochant dans l’air, évaporation de l’illusion dont une partie de son esprit n’a pas le temps de se préoccuper. « Oui, vas-y, défonce-nous. Montre leur ce dont tu es capable. » « Rappelez-moi de ne pas intervenir le jour où ces ‘'salopards de Boosthead'' seront vos enfants ou vos frères. » Le ton est tranchant, soudain bien moins doux et sympathique, un potentiel d’acidité au bout de la langue, pour simplement leur offrir son indifférence et reporter son attention sur le groupe à l’origine de l’incident. « Dis-moi que tu n’en as pas pris, que tu n’as pas été assez stupide. » Un rire qui déchire la gorge de la petite blonde au carré. « Je n’en ai pas pris assez pour t’arranger le portrait. » C’est là qu’elle le remarque, le noir au bord des lèvres, au coin des yeux, ça coule, ça dégueule d’un liquide difficile à identifier, c’est morbide et c’est surtout terrifiant pour la grande soeur qu’elle ne pourrait jamais cesser d’être. « Ca suffit. » A l’angle de son regard, le troisième larron a sorti une lame, aussi suicidaire que bête et un geste de la main suffit à repousser son corps un peu plus loin - c’est incroyablement dangereux, toutes les molécules de l’enveloppe charnelle se dessinent dans son esprit, elle visualise déjà un drame, l’énergie que ça va lui prendre de retenir quatre personne, l’idée seule qu’ils puissent finir démembrés. Il se contente de trébucher un mètre plus loin, déstabilisé. « T’as pas envie que les gens sachent, Hemera ? » Les paupières se ferment, un instant, pour conserver la maîtrise relative de ses émotions. Elle doit la traiter comme n’importe qui mais comment faire quand elle est la seule personne de cette maudite ville à connaître ses secrets ? Cornelia ne peut pas ignorer les capacités de son aînée, elle en a fait les frais toute sa vie, comme elle ne peut pas croire au soi-disant cursus dans une université allemande pour expliquer la disparition des portraits sur les tapis rouges aux côtés de leur père.

Choc. Elle est expulsée par ce liquide noirâtre, étrangement solide à l’impact, qui lui fait heurter les vitres d’un bâtiment. Ca colle. Et elle réalise en se relevant, la blancheur tachée d’anthracite, que ça a tout du goudron, que c’est probablement tout aussi inflammable. Il en faut plus pour la sonner, pourtant bien moins pour la mettre hors d’elle. La jalousie n’a-t-elle jamais eu de limites ? C’est ça, qu’ils font à leurs proches, quand ils atteignent les sphères médiatiques de Seraph ? « Très bien. » L’autre jet est arrêté en plein vol, à l’aide des deux mains d’Hemera qui en fige les molécules, même à distance ça lui donne l’impression de manier quelque chose de visqueux, une matière trop chimique pour émaner d’un corps humain. C’est une flaque qui retombe au sol, sans qu’elle tente d’en défaire la structure, craignant d’épuiser les ressources de sa propre carcasse. Les flammes bleues viennent lécher le décor et si ça n’avait pas été un réel danger, la scène se serait avérée réellement cinématographique.

Le flash lumineux qu’elle provoque fait diversion pour effacer ses contours, elle disparaît de leur visibilité, évite de mettre les pieds dans la substance étalée qui marquerait son avancée pour atteindre le quatrième acolyte, scotché mais apparemment inoffensif pour le moment, et l’assomme dans le doute. Le corps tombe, le gamin en flammes gueule, panique de ne plus savoir qui ou quoi viser. C’est ensuite au tour de celui qui tient une lame de se faire tordre le bras, poussé au sol, neutralisé les mains dans le dos. « Tiens toi tranquille ou je te jure que tu n’auras plus l’occasion de te faire un rail de boost avant très longtemps, sans tes jolis petits bras. » Elle a le pied posé sur sa colonne vertébrale quand elle réapparaît, laissant la foule constater qu’elle n’a pas lâchement déserté les lieux mais patiente le temps que la victime cesse de s’agiter. « Ca va, on vous dérange pas ? Vous voulez pas un autographe tant qu’on y est ? Un peu de bienveillance et de raison parmi vous c’est trop demandé je suppose ? » A ce rythme, il ne va lui rester que deux solutions : tuer ou les laisser tuer. Aucune de ces deux options n’est acceptable, or elle ne se sent pas encore capable de lutter à mort contre l’équivalent d’adolescents. C’est ce qu’ils sont, pour elle, des ados qui ont refusé de grandir, une cuillère en or dans la bouche et des rêves déçus plein la tête. Elle travaille généralement en duo et elle se surprend à regretter que Puppeteer ne soit pas dans les parages pour neutraliser Cornelia. Il l'aurait fait sans douleur, sans la blesser, lui.

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@Maximillian Grayson

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Et le show continue évidemment. Parce qu'ils sont dans la vraie vie et qu'il n'y a pas de pause au premier tiers d'un affrontement le temps de lancer les publicités. La foule se fait de plus en plus vindicative. Les voix montent, tonnent, répondent. Le pire émerge déjà de l'effet de meute. En plus des invectives visant à pousser l'héroïne à fracasser ses adversaires, les commentaires plus déplaisants n'échappent pas aux super-sens du Solar qui perd son envie de rire sitôt qu'on commence à sexualiser les descriptions sans que personne ne s'en offusque réellement. Pas même les parents qui laissent les mômes aux premières loges, entre la vision des combats qui vont crescendo et les remarques désobligeantes.

Le fait qu'Héméra ait répondu à la foule n'avait par ailleurs fait qu'accentuer l'envie du groupe à pousser plus loin l'interaction. Max avait eu une petite grimace. Ne jamais, jamais interagir avec des gens dans ce genre de circonstance, sans quoi ils auront l'impression d'être directement acteurs des choses et auront tendance à s'énerver ou pire à avoir envie de participer aussi.

« Vous devriez faire ce que vous avez à faire et ne pas répondre aux gens... » s'était-il hasardé à lancer. Mais il n'était que... le gars bizarre dans son sweat gris, sa casquette et ses lunettes de soleil. L'archétype parfait du stalkeur qui vient sonner à l'interphone pour respirer fort dans le micro.

Les bras croisés, il grimaça un peu plus encore quand les choses se complexifient encore. Un couteau dans l'équation. Des crachats gras, noirâtres, probablement inflammables à en juger l'odeur et la consistance. Si l'Allumette et la cracheuse travaillaient de pair et se coordonnaient un peu mieux, la situation pourrait vite tourner au désastre, d'ailleurs.
Mais il était question de jeunes idiots. Des junkies. Des abrutis en plein trip incapables d'aligner des idées cohérentes. Provoqués par la foule, oppressés par la situation, incapables de raisonner à cause de la drogue et en pleines découvertes de capacités surhumaines qu'ils ne maitrisaient absolument pas, ils courraient simplement à la catastrophe.

En se faufilant un peu, il chercha à s'extraire de la foule, et à faire un petit pas en avant, sans songer qu'il suffisait en général d'un débile profond pour entraîner les autres avec lui. Alors, lorsqu'il pensa pouvoir approcher la scène, afin d'y mettre son petit grain de sel en semant quelques conseils qu'il jugeait parfaitement pertinents, il n'imaginait pas que derrière, d'autres suivraient, rapprochant bêtement les « innocents » des combats, des flammes, des projectiles et de l'absence totale de contrôle des lascars sous Boost.

« Heu, s'il vous plait ? »

Il s'avançait encore, levant la main, attirant quelques regards un peu mauvais, et suintant d'incompréhension de la part de l'allumette, pas en grande forme, certes, mais qui semblaient reprendre du poil de la bête malgré tout.

« Sans vouloir vous commander, je pense que vous devriez changer votre plan d'attaque. Ce type avec le couteau n'est pas un danger immédiat, en revanche mademoiselle ici présente peut toujours s'en prendre à vous à distance et son ami qui se remet de sa petite démonstration sera sur pied dans vraiment peu de temps et... »

Les autres s'étaient rapprochés, et il fut presque à nouveau ravalé par le groupe, lui, le weirdo dans son fichu. Le feu bizarre qui continuait à ronger un peu la façade fit d'ailleurs exploser les vitres qui s'écroulèrent sur la chaussée, faisant sursauter les témoins qui... piaillèrent de joie et s'extasièrent d'être là, aux premières loges, à deux doigts de se donner des accolades de victoire en échangeant des regards qui permettaient de deviner à quel point ils étaient tous ravis d'assister à ça.

« Vous devriez reculer... »

Tenta quand même Max.

« Je vais vraiment appeler les flics. C'est du harcèlement. Arrêtez de me parler. Weirdo »

Ah, encore cette insulte. Il roula les yeux, relança un regard vers la scène.

« Il s'est relevé ! »

Tenta quand même le Solar, les deux mains autour de la bouche en porte-voix. De quoi exciter plus encore la foule qui manqua d'exploser de joie à l'idée de voir l'Allumette qui se relevait en jetant des regards totalement fous aux alentours et qui avait visiblement décidé de se servir à nouveau de ses pouvoirs pour essayer de calciner tout et n'importe. Une autre voiture, par exemple. À moins qu'il ne veuille simplement carboniser les spectateurs qui se trouvaient trop proches, et qui se comportaient de manière beaucoup trop hargneuse et hostile pour que son petit cerveau de camé en roue libre puisse avoir une réaction sereine et paisible.  

Les flammes, elles, continuaient leur progression, la chaleur anormale du feu lézardant un peu plus la façade déjà salement amochée, et qu'un énorme écran géant projetant des pubs commençait à grincer anormalement, comme si la fragilité du mur rendait les fixations de moins en moins solides et que d'ici quelque temps à peine, la colossale plaque LCD allait s'écrouler sur les crétins qui n'avaient d'yeux que pour la bagarre.

« C'est pas vrai... »

S'ajoutait au désastre annoncé l'énervement de plus en plus palpable de l'allumette dont les flammes  couvraient maintenant le corps entier, chacun de ses petits pas créant sur le sol de petites empreintes de pied flamboyantes qui allait jusqu'à faire fondre l'asphalte de la route et dont l'aura de chaleur déformait maintenant la structure d'un feu tricolore à côté duquel se tenait le Boosthead.  

@Anastasia Weiss

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« Sans vouloir vous commander, je pense que vous devriez changer votre plan d’attaque. » L’oreille est attirée par la voix mais les yeux ne lâchent pas les deux camés aux pouvoirs tendant à l’absolue perte de contrôle. Pas une menace. Non, en effet, sauf pour eux-mêmes et c’était là ce qui comptait. Elle ne fait pas attention à son allure, contrairement à la foule, qu’il passe pour l’archétype du stalker l’indiffère, et l’aurait indifféré dans n’importe quelle autre situation. « J’ai l’air d’avoir un plan d’attaque ? » lui lâche-t-elle, laissant retomber ses bras dans un signe d’évidence. « Je veux seulement épuiser leurs ressources, pas les blesser. » Surtout pas les blesser. L’état de Cornelia dévore autant sa patience que les bordures de ce qu’il lui reste de coeur, éteint dans l’engrenage de Seraph, rendu amorphe par la crainte de faire du mal à quelqu’un qui pourrait lui être proche. Elle n’a plus laissé personne entrer dans sa sphère privée depuis Alejandro. Elle s’est écartée de son père, qu’elle adore pourtant, de l’influence nocive de sa mère et a tout tenté pour ne plus pousser sa soeur dans l’ombre - en vain, visiblement. La solitude qu’elle s’impose ne paraît pas suffire à compenser l’image qu’ont les humains lambda du privilège d’avoir des pouvoirs.

Le brasier la force à se recentrer. Elle n’a pas les capacités utiles pour éteindre ça, du moins pas sans dégâts. Il avance et elle recule de quelques pas, son regard accroche le décor, la façade qui lézarde, l’écran qui menace de céder, le sol qui peine à résister à l’intensité de la chaleur. Une profonde inspiration plus tard, elle prend le risque inconsidéré de lever les mains, et un étau invisible arrache l’incendiaire du sol. Contenir les molécules sous haute température lui demande un effort démesuré, infusé de la terreur d’échouer, de le désarticuler au lieu de simplement l’écarter de la foule hystérique. C’est une borne à incendie qui est visée, elle le rejette avec toute sa force contre le dispositif qui craque dans un bruit sourd, dégueule son liquide chargé d’éteindre le carburant sur pattes. La pression arrose les alentours et éclabousse la population, sans qu’elle s’en préoccupe. Un genou à terre, il lui faut plusieurs secondes pour retrouver un souffle normal, un rythme cardiaque décent, le décor rendu flou par ses propres entraves : son esprit laisse tourbillonner l’idée néfaste qu’elle n’est pas capable. Ce n’est pas son rôle, de se trouver là, dans ce capharnaüm de sons, de cris, d’attention. Elle voudrait juste disparaître, elle voudrait que le chaos ne nécessite que des mirages, quelques illusions et des négociations, qu’il ne faille pas risquer la vie des innocents à chaque utilisation de ces maudites capacités, qu’une part d’elle, dans ces circonstances, ne peut s’empêcher de détester.

Un éclair de taser dans l’angle du champ de vision aurait pu l’alerter sur l’effet de meute, seulement le craquement sonore de l’écran sur le point de céder fait lever les têtes avant qu’elle ne s’y intéresse. Elle a un choix à faire : soutenir les fixation ou mettre sa soeur hors d’état de nuire. Les lèvres se pincent. Le rire derrière elle s’étouffe, parce que la jeune femme a la bouche pleine de ce liquide noirâtre qui semble osciller entre offrir du pouvoir et menacer de l’étouffer - une chance, quelque part, pour la ralentir, et un fléau pour la panique qui bouffe les nerfs de son aînée.

L’écran bascule et la réflexion laisse place au réflexe, les mains au-dessus d’elle, positionnées en bouclier invisible ralentissent la chute, la foule hurle et se disperse légèrement mais la course est amortie. Elle a toujours un genou contre le sol, ce qui lui assure de ne pas céder sous les capacités qu’elle doit déployer pour gérer la trajectoire. Une goutte de sang perle au bord du nez. « Tu peux pas sauver sans détruire. » raille, dans des bulles épaisses, une Cornelia instable, en plein délire, dont la colère et la rancoeur sont le seul reste de sa personnalité. Hemera les sent, les coins de l’écran lentement dévorés par la friction imposée à sa structure moléculaire, elle ne parvient pas à les maintenir ensemble sans en accélérer les composantes et elle ignore ce que l’implosion pourrait provoquer. Il semble alors évident qu’elle choisit de le diriger vers elle, pour qu’il lui retombe dessus plutôt que sur quiconque autour. Si elle laissait ses capacités se déverser à l’instinct total, peut-être ne s’épuiserait-elle pas si vite - elle en a trop peur pour ne serait-ce que l’envisager.

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@Maximillian Grayson

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« Hey ça c'était plutôt impressionnant ! » Lance Max, sans que ça ne couvre pour autant le brouhaha qui régnait autour de lui. Pas sûr donc, que ses encouragements en ayant vu l'un des opposés sous Boost être arraché du sol, et propulsé vers une bouche d'incendie qui balança des torrents d'eau dans tous les sens, éteignant les flammes qui couvraient le corps de l'allumette. « Non franchement c'était pas mal du tout. »

La bonne femme agacée n'avait plus envie de répondre. Elle fouillait à présent dans son sac à main, manquant par ailleurs la suite du spectacle.
Les spectateurs, trempés jusqu'aux os, étaient aux anges. Un peu de fraîcheur aurait probablement pu tempérer les ardeurs de chacun, mais c'était beaucoup trop en demander dans une ville aussi folle que Los Angeles.

En entendant craquer au-dessus d'eux, certains commencèrent à s'éparpiller. Un petit mouvement de foule commença à se créer, mais puisqu'ils avaient tous à gérer de nouveaux stimulus visuels, la fuite fut courte, désordonnée et pas bien utile, au fond. Restait que sous l'imposante dalle LCD qui s'apprêtait à tomber risquait de transformer en crêpes plusieurs mômes, des parents et une bigote très énervée qui avait enfin achevé de fouiller son sac à main pour brandir un tazer.

Max entendit les arcs qui se formèrent entre les deux pointes métalliques de l'arme. Une fois, deux fois, comme pour s'assurer que le tout allait fonctionner, avant que l'amertume de la dame ne la pousse à venir coller les dents de son appareillage contre son flanc pour lui envoyer le plein voltage.

Le résultat fut, il faut bien l'avouer, assez peu efficace. Max eut un petit mouvement de recule, une grimace d'agacement, mais surtout... avec les tonnes d'eau balancée par la bouche d'incendie, l'arc éléctrique était remonté vers l'instigatrice de ce petit moment électrique et c'est bien elle qui se raidie et s'agita au sol, secouée par quelques petites convulsions, à la manière d'un saumon qui avait eu l'idée prodigieuse de bondir hors de l'eau et qui sautillait stupidement sur la berge dans l'espoir de revenir d'où il venait.

Max lui, s'inquiétait de l'état de son haut, trempé et un peu noirci.

Tout aurait pu s'arrêter là. Mais les attaches d'acier qui maintenaient l'écran gigantesque sur la façade crurent bon de lâcher à cet instant précis. Le Solar leva les yeux, grommela un petit juron – c'était rare – et leva les bras par réflexe comme le firent les autres des malchanceux qui se trouvaient en dessus. La chute n'arriva toutefois pas, l'écran était visiblement ralenti dans sa chute par les talents de l'héroïne du jour, qui semblait tout de même peiner à garder le contrôle sur un truc de cette taille.
À vue de nez, une à deux petites tonnes minimum, d'après Max.
Cette fois, il était vraiment de mauvaise humeur. D'autres débris menacèrent de tomber. La jeune héroïne a l'air dépassée, son sweat est foutu, des gosses vont mourir et il y a de la buée sur ses Raybans.

Il s'avança finalement d'un pas et concentrant sa force dans une accélération formidable s'empressa de rejoindre l’héroïne qui semblait avait décidé de se mettre l'énorme panneau sur le coin du museau plutôt que de risquer la vie d'innocents. Le sprint suffit à faire claquer l'air sous l'accélération, déclenchant les alarmes des véhicules alentour avant qu'il ne se tienne là, debout, à quelques pas d'Héméra, pour faire bêtement barrage de son corps entre la dalle LCD qui se brisa sur ses dorsaux, et acheva sa course en bousillant quelques voitures de luxe, et en faisant taire une ou deux alarmes. Le pire pour lui étant que dans sa progression fulgurante, sa capuche s'était barrée, sa casquette était aux abonnés absents et il avait entendu le bruit de ses lunettes de soleil qui se brisait sur le bitume.

« Je déteste cette journée. » Grommela-t-il en tendant une main secourable à la jeune pousse de chez Seraph Inc pour l'inviter à se remettre debout. Parce qu'il était hors de question que les héros restent au sol et donne l'impression de plier sous la contrainte, l'effort ou même la douleur.

« Hm, ce n'est pas optimal, mais c'est du bon travail. Rien de cassé ? »

Il devait l'admettre. Elle était jeune. Ils étaient plusieurs. Et elle avait tout de même réussi quelques jolies prouesses et les dégâts, eux, étaient plutôt légers... d'après lui.
L'important étant qu'il n'y ait pour l'heure, aucune victime trop grièvement touchée. Son regard remonta vers la Boosthead la plus proche, et il amorça quelques pas lents et lestes dans sa direction, en remontant lentement ses manches et en la pointant finalement du doigt.

« Miss, je vais  vous inviter à sagement renoncer à l'idée de cracher quoi que ce soit et à vous allonger sur le ventre afin d'attendre les autorités pour sagement mettre vos mains sur votre tête pour que tout rentre dans l'ordre et qu'il n'y a pas davantage de dégâts. Dans le cas contraire... »

Il n'y avait pas besoin de faire un dessin, et il s'éleva lentement du sol comme se grandir plus encore et pour se tenir plus proches de l'astre diurne afin de se tenir là, bras légèrement écartés dans une posture presque christique qui appelait à la paix, attendant à l'évidence un simple petit geste trop agressif pour lui servir de Casus Belli. La situation venait juste de lui rappeler qu'il ne pouvait échapper à sa condition. Qu'il était plus ou moins contraint de rester The Defender en toutes circonstances et que Max Grayson n'avait plus vraiment de raison d'être. Et... le constat était amer. De quoi le mettre d'une sale, très sale humeur.

@Anastasia Weiss

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❖  ❖  ❖
La prise lâche, les bras retombent le long du corps, le visage baissé, un rideau de cheveux blonds dissimulant le sang perlant au bord de ses narines. Une forme de déconnexion s’opère, un court instant durant lequel elle perçoit encore les molécules en friction comme si elles s’agitaient dans son esprit pour être brutalement renvoyée dans sa carcasse fragilisée. C’est durant ce maigre laps de temps que l’écran s’est brisé sous l’impulsion providentielle de celui qu’elle ne voit pas, le souffle trop court. La brûlure cuisante de l’échec mord les contours de sa maîtrise émotionnelle, l’ombre de sa mère secouant la tête d’un air déçu se matérialisant dans ses pensées désordonnées. La main s’impose dans son champ de vision et elle la prend dans un geste presque gracieux en contraste avec la silhouette incarnant force et protection venue à son secours. « Merci.. » Elle se redresse après avoir essuyé le rouge donnant à sa langue la saveur métallique et c’est là, enfin, que les yeux redevenus hétérochromes croisent le visage masculin. « Il en faut un peu plus pour m’abîmer. » C’est presque un sourire en coin. En d’autres circonstances, peut-être aurait-elle reculé, tenté d’échapper à son aura, à l’attention instantanée qu’il jette sur chaque endroit que ses pas foulent, que sa cape frôle. L’absence de la tenue éclatante, de ladite cape, du package marketing choque sans doute, pas assez pour ne pas le reconnaître, de manière arrangeante pour ne pas se sentir maigre miroir à l’ombre de l’étendard de Seraph Inc. Il y’a ce flottement durant lequel elle ne sait pas quoi dire, quoi faire. Elle déteste cette journée aussi, et ça l’indiffère que ce soit du bon travail, elle ne l’a pas fait pour ça, elle ne l’a pas considéré comme tel, sa seule volonté ayant été de prévenir un carnage. Servir son propre idéal, quand bien même ce soit derrière le masque de la firme. Que vont-ils avoir l’idée de faire de ses frasques ? Il est déjà reparti jouer son rôle, sa parfaite partition, tandis qu’elle pivote pour le voir s’élever, figure prophétique, céleste. Pas de soulagement dans son estomac qui se serre, parce qu’elle est inconsciente mais pas stupide, elle sait ce qu’il advient de ceux qui lui résistent. Elle ne fait pas le poids face à Defender, elle se ferait réduire en miettes avant d’avoir esquissé le moindre geste. La lumière est encore haute dans le ciel, une caresse sur sa peau, chaleureux réconfort au bout de ses doigts.

Cornelia titube. A elle, le soleil ne paraît pas apporter de tendresse, d’apaisement. Elle est horrifique, le regard vide, dévoré de rage. Elle n’aurait aucune raison d’éprouver de la jalousie ou de la rancoeur face à celui-ci, face à l’image qu’elle a toujours rêvé d’être, pourtant la rationalité a déserté l’esprit bouffé par la substance. « Oh, c’est mignon. Il vient au secours de sa miniature. » Vexation. Cette fois, ça parvient à la froisser, un peu. Elle n’a rien en commun avec lui. De ce qu’elle en a vu, leurs capacités ne se confondent pas. Elle n’a pas envie de lire des âneries pareilles rapportée dans tous les journaux de la ville et elle n’a pas assez d’influence pour les faire taire. L’angoisse remonte, pulse dans les veines et elle devine plus qu’elle ne voit le projectile se diriger vers le héros. Le silhouette de Cornelia est dupliquée, copiée, trompe l’oeil chargé de perturber l’attention. Qu’importe qu’elle tire sur la corde de ses aptitudes, Hemera s’interpose. Et elle brille, peut-être plus fort qu’elle ne l’a jamais fait, quand elle se place entre sa soeur et le phare de l’humanité. « Non ! » Les mirages ne tiennent pas, dès l’instant où elle s’est trouvée devant sa vraie soeur, ils se sont dissous dans l’air, ont grésillé comme des écrans qu’on éteint. « Ils ne sont pas responsables de leurs actes et vous avez une force démesurée. Je ne peux pas vous laisser faire ça, et si ça implique de me faire réduire en poussière, soit. » Ca aurait pu fonctionner, si la foule était contenue, si l’attention s’était dispersée, s’ils avaient pu discuter, si Cornelia était dans un état lui permettant de voir que, malgré tout, son aînée la défendait, même face à un être dont la puissance la dépassait largement. Cornelia ne le pouvait pas et le liquide poisseux s’est simplement mis à serpenter le long des bras d’Hemera, de ces longs gants ne couvrant pas ses mains, jusqu’à sa bouche, emprisonnant son souffle dans une expression douloureuse. Protéger et servir mais à quel prix ?

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❖  ❖  ❖ Perché là, à plusieurs mètres au-dessus du sol, le Defender toise l'inconnue prête à vomir sa rage au travers d'un pouvoir à l'image de l'acidité qui semblait la consumer. Le Solar ne rend en retour, qu'une forme de pitié un peu dédaigneuse qu'on pourrait aisément prendre pour une posture hautaine pleine de jugement. Max pourtant, toise et s’écœure surtout de constater que cette petite idiote ne mesure pas le poids des responsabilités qu'elle exige. Qu'elle ne sait pas à quel point il est intenable d'être ce qu'elle se pense être. Toute puissante.

Vaste blague.

Il serre les poings, s'apprête à fond sur elle et à régler ce conflit d'une fois pour toutes et pourtant voilà que l'héroïne s'interpose, coupant net son élan. Ils ne sont pas responsables, explique-t-elle. Son regard à lui glisse vers les dégâts. Les flammes qui si elles ont été maîtrisées ont pu ronger la façade. L'explosion du réservoir de la voiture qui a soufflé les alentours. Le goudron partiellement fondu. Les marques de crachats noirâtres et odorants encore au sol.

« S'ils n'avaient pas pertinemment choisi de prendre tous les risques pour une infime chance d'accéder à des pouvoirs, j'aurais pu comprendre l'irresponsabilité. Mais là... »

Le Phare de l'Humanité est là pour guider les gens vers le sommet. La lumière qu'on tend à attendre. Cependant, il est aussi et surtout un protecteur. Et il n'y a que dans les esprits naïfs et enfantins que cette même protection n'est fonctionnelle que parce que les gens dangereux finissent tôt ou tard par se heurter à des conséquences désagréables. En fait, l'irresponsabilité mentionnée est presque, d'après lui, une forme d'acceptation de ce genre d'acte.

Il n'a pas à pousser bien loin le dialogue que les problèmes surviennent déjà, de toute manière. Le mucus noirâtre se répand encore, rampe, atteint totalement l'héroïne qui se retrouve partiellement piégée. Le Primordial resta là, en l'air, à aviser la scène en secouant lentement la tête de gauche à droite avant de rouler les yeux vers le ciel.

Il revint se plancher des vaches, et passa à côté de l'héroïne. Hors de question de se risquer à mettre les mains dans la gadoue sombre qui lui saturait les narines. C'était sa source qu'il visait et qu'il remonta d'un pas lent, comme s'il tenait aussi à ce qu'Héméra apprenne de son erreur, qu'elle souffre juste assez pour que la leçon soit durement apprise. C'est encore comme ça qu'on forge les avis les plus pertinents : dans le creuset du réel. Là où les jolis idéaux se confrontent aux difficultés. Là où les délires des gens qui pensent que la paix s'obtient par la tempérance et la patience.

Ceci étant, il n'allait pas pour autant la laisser se faire simplement torturer. Une seconde, peut-être deux, et à nouveau il fondait sur sa cible du moment à pleine vitesse. Sa main droite trouva le visage de la cracheuse de venin qu'il avait entraîné plusieurs mètres plus loin dans l'élan et collé si fort au flanc d'une camionnette que la taule s'était pliée.

Là, Cornélia s'était retrouvée avec juste deux doigts qui la tenaient en respect. Un pouce et un index qui, en plus de forcer sur les deux ailes de sa mâchoire et menaçaient de faire exploser sa mandibule d'une pression un peu forte, la maintenait aussi surélevée à dix centimètres du sol comme si elle n'était qu'une petite brindille attendant sur la bonne volonté d'une bourrasque de vent pour enfin avoir le droit de retrouver la terre.

« Je suis magnanime. Libère-la sciemment de ta bisque écœurante... ou je te force à perdre toute possibilité de contrôler ton pouvoir... »

En lui brisant le visage entre ses doigts, ce qui devrait très probablement la faire tomber inconsciente ne fusse qu'à cause de la douleur.
Il se prend aussi d'un air songeur. N'y avait-il pas quatre éléments problématiques initialement. L'Allumette. Le premier à avoir été mis inconscient. Le crétin au couteau. Et celle qu'il tenait. Il daigna jeter un bref regard par-dessus son épaule, juste pour s'assurer qu'un autre n'irait pas tenter de jouer les surineurs. Larder la foule de coups de couteau, ou l'héroïne momentanément maintenue serait très, très ennuyant.

@Anastasia Weiss

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❖  ❖  ❖
Une infime chance d’accéder à des pouvoirs, oui, mais est-il seulement conscient qu’il en est l’incarnation ? Que c’est pour lui ressembler, que beaucoup s’y essayent ? C’est pour cette même raison que Cornelia a perdu le sens des réalités : atteindre l’image d’idéal qu’on a fait peser sur les capacités de sa soeur. Hemera se retrouve piégée, instant d’asphyxie qui l’oblige à fermer les yeux, obstruction gluante qui la renvoie à un autre morceau de sa vie, l’extirpe à travers le temps et l’espace. Les doigts autour de sa gorge, la caresse poisseuse le long de son bras, la peur qui fait sauter les remparts de son esprit. Le contrôle auquel la mutante s’est astreinte s’effondre, le barrage plonge dans la cascade dévastatrice de sa mémoire. Elle mérite la souffrance. Bien sûr qu’elle l’a mérite, parce qu’il la hante, ce corps inerte, la tête penchant sur le côté, défait de l’existence avec brutalité. Ca brûle les poumons et le masque dissimule une larme échappée, entre douleur et passé.

En écho, Cornelia paye son audace entre les mains trop puissantes de Defender, et si son regard bordé de noir se veut plein de provocation, de folie pure, il parvient à ramener quelque chose, un semblant de sa volonté de vivre, d’expérimenter, de ne pas se faire réduire à néant au seuil de, peut-être, trouver la solution pour que chacun puisse obtenir le quart de son prestige. Elle est trop lente, cependant. Ce qui cède chez Hemera fait crépiter l’air. Elle se débat soudainement avec ce qui lui colle à la peau, l’agitation de ses doigts tentant de griffer la substance répugnante provoquant des éclats, la détonation de molécules frictionnées, arrachées de leur base, corruption mentale des capacités. Son regard se rive finalement sur le décor parce qu’elle ne veut plus replonger dans cette scène terrifiante. Le soleil chaleureux ne parvient plus à la réconforter. Elle est relâchée dans le sursaut que provoque la porte remuant sur ses gongs face à elle, Cornélia surprise par le bruit métallique. L’enveloppe blanche tachée d’anthracite retombe au sol, imitée par cette entrée qui manque écraser un adolescent s’apprêtant à traverser. La petite soeur paraît arriver au bout des forces qui lui permettaient de résister à l’horreur qu’a déclenché le boost, peut-être seulement ramollie ou proche du coma. Le quatrième, jusque là trop couard pour s’en mêler, décide de profiter de la faiblesse, armé d’un tesson de bouteille, se ruant vers la poupée affaissée dont la lumière s’est éteinte.

Il vole avant de l’atteindre. Il vole sous l’impulsion rageuse, sous le fléau émotionnel qui fait perdre toute raison, confond les silhouettes, qu’importe qu’il ne soit pas Alejandro, que ce ne soit pas vraiment un tango, que ce qui est venu courir sur sa peau ne soit rien d’autre qu’une sorte de goudron immonde. Elle y laisse le dernier éclat de pouvoir, les dernières forces qui résident dans la limite, dans le coin sombre d’un instinct de survie destructeur et l’envoie valser à proximité du Phare de l’Humanité, trainé sur le bitume plusieurs mètres, les vêtements mis à l’épreuve par le manque de prudence - la manipulation moléculaire menace d’atteindre le point où elle ne peut plus se faire passer pour de la télékinésie. Il hurle et elle ne l’entend pas, parce qu’elle titube jusqu’au duo, le sang s’échappant à nouveau abondamment de ses narines. « C’est ma soeur. Et peut-être qu’elle me hait mais c’est tout ce qu’il me reste à sauver alors abîmez la et je vous jure que je trouverais le moyen de vous pourrir la vie. » Le ton est trop bas pour que la foule l’entende, c’est un murmure crispé, un timbre en tension. Le gamin au sol pleure, peut-être de terreur ou de la brûlure qui s’étend le long de son pantalon déchiré durant la trajectoire. « Appelle les secours, fais ça pour tes potes. » C’est tout. Elle ne tend pas la main, elle n’aide pas à se relever. Il y’a un fantôme, quelque part dans son regard, celui d’une cassure qu’on tente d’oublier, de nier autant que possible. Le décor semble vaciller, à moins qu’elle ne tienne plus très bien sur les talons compensés de ses bottes. « C’est parce que certaines personnes brillent trop fort que d’autres se détruisent, Defender, mais ça ne vous atteint probablement plus depuis le temps.. »

Les pas reculent, elle fait demi-tour maladroitement dans l’espoir de s’effondrer au coin d’une ruelle, le temps de reprendre ses esprits, le temps que son myocarde se calme, que les tremblements de ses doigts cessent, le temps que son enveloppe charnelle récupère de l’effort considérable qu’enchaîner avec un cocktail de ses capacités a demandé. Elle ne peut pas, il y a le mur de la foule trop enthousiaste, les flashs qui immortalisent les dégâts. Elle abandonne l’idée de les traverser, appuie une main contre le capot d’une voiture pour se stabiliser, s’obligeant à respirer profondément. Le môme n'a rien qu'une chute à moto n'aurait pu lui faire, Cornelia s'en tirera si le héros n'insiste pas, les deux autres sont sortis de ses pensées.

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❖  ❖  ❖ Patient, il l'est. L'azur de son regard semble toutefois lentement perdre de sa profondeur et de son humanité alors que la lumière s'accentue, comme un compte à rebours qui, lorsqu'il attendrait son plein éclat se solderait par une douleur affreuse et une blessure tout aussi traumatisante de laquelle Cornélia ne redeviendrait peut-être jamais elle-même. Le Solar ne sait pas si c'est cette menace ou une quelconque autre force qui mène Héméra à se détacher de l'emprise visqueuse qui menaçait de la tuer à petit feu, mais il n'empêche qu'elle parvient à s'en libérer. Et qu'il est prêt à considérer que ce fait est dépendant de la volonté de sa proie.

Homme de parole, il défait sa poigne. Ses yeux redeviennent deux glaciers profonds, et sa poigne libère la blonde qui retrouve le sol. Il ne l'a pourtant pas lâchée non plus. C'est par le col qui la tient en respect, et l'empêche de tomber. Il sent que ses jambes ne la porteront plus très longtemps, à ce train-là. Le Boost achève ici sa petite période d'euphorie qui aura consumé dans la manœuvre la majorité de l'énergie disponible de chacun des crétins s'étant persuadés qu'une drogue aussi aléatoire et stupidement dangereuse puisse être la solution à leurs problèmes et leurs complexes.

L'héroïne l'a rejoint. Ses paroles semblent rebondir sur lui comme n'importe quelle balle l'aurait fait. Max n'est pas quelqu'un qu'on peut soumettre par les menaces, il faut dire. Il y a des gens qui ne peuvent simplement pas être détruits par ce genre de levier. En fait... il était même plus ou moins certain qu'il n'existait rien qui puisse, comme elle le disait, lui pourrir la vie. L'avantage d'une vie monastique, triste à pleurer, c'est qu'on limite les écarts. Max – pardon Defender – est lisse. Sans accrocs réels. Du moins le croit-il.

« Tu devrais économiser tes forces et choisir tes mots et les cibles de tes menaces avec un peu plus de jugeote. »

Mais ses doigts relâchent leur prise, et sa main se contente d'accompagner le corps faible et dépourvu de tonicité de la sœur qui finit elle aussi allongé, peinant à garder les yeux ouverts. Le Boost l'avait rongé de l'intérieur. Il prit le temps de s'assurer qu'elle repose sur le flanc, pour ne pas que les restes de son mucus affreux ne viennent obstruer ses voies aériennes. L'autre idiot, propulsé avec pertes et fracas sur le sol, a l'air mal en point, mais il vivre. Probablement sans être en mesure de s'asseoir convenablement pendant plusieurs semaines. C'est le prix à payer pour jouer au con. Et dans l'état actuel des choses, il devait s'estimer heureux de ne souffrir que de ces blessures-là.

« Ils vivront tous les deux. » Assure-t-il, après que ses yeux soient passés par la captation d'autres spectres lumineux afin d'entrevoir, entre autres, les organes internes qui ne semblaient pas présenter d'anomalies gravissimes. Ils étaient justes tous dans la phase désagréablement monstrueuse d'un trip. Parce que c'était ça, le Boost. Un plaisir et une sensation de puissance de courte durée. Il n'y avait rien de positif à en tirer. Aucun n'avait eu ne serait-ce qu'un semblant de contrôle sur ce qu'ils faisaient. Pas plus qu'ils n’avaient pu atteindre une petite marche sur la longue, très longue ascension vers le succès qui semblait être l'envie première de certains.

« Ne fais surtout pas l'erreur de penser que tu peux jouer les moralistes avec moi. »

Qu'il lança en réponse immédiate des derniers mots de l'apprentie.

« Lève le nez, et regarde. Ces petits drapeaux, les écrans géants. Je me suis arrêté de vivre parce que j'ai ces pouvoirs dans le but de les mettre au service des gens. Et les gens ne fêtent que mes plus grands échecs. »

Tuer étant indubitablement une absence de réussite des idéaux qui étaient les siens en se lançant dans cette voie-là. Ceci dit, comme il l'avait très vite appris... l'idéalisme ne fonctionne simplement pas. Le monde n'est pas aussi facile que dans un film. Le monde n'est pas celui utopiste que des crétins qui ne connaissent rien au réel dépeignent. On ne fait pas d'omelettes sans casser des oeufs, en somme.

« Je t'interdis de présumer de ce qui m'atteint ou non. Pas tant que les gens n'auront pas commencé à t'aduler en considérant que l'acte qui a lancé ta légende est d'avoir écrasé la trachée de ton mentor et ami. »

Pour l'empêcher de perpétrer un massacre, certes.
Il recula d'un pas, s'ébroua un peu, fin prêt à disparaître d'un bond sans un regard de plus vers la foule, mais les mouvements de la jeune héroïne attirant son attention. Mauvaise direction. Très mauvaise direction, que de se diriger vers les objectifs. D'autant qu'elle semblait faible, avec son sang au coin du pif, les larmes dont il pouvait sentir l'odeur du sel et sa nécessité à s'appuyer sur une voiture pour reprendre son souffle.

Il aurait aimé pouvoir se contenté de cette petite session de "grondage" paternaliste du vieux plein d'expérience qui remet la jeunesse à sa place, mais... Il n'était pas vraiment fait de ce bois-là.

« Viens. » Il lance, directif, parce qu'il avait l'habitude que lorsque les gens se perdaient dans la fatigue, la tristesse et d'autres émotions de ce genre, ils soient plus faciles à diriger dans la bonne direction par l'usage de l'impératif que par des longues phrases trop explicatives. « Les requins aiment le sang. Ne leur donne pas cette joie. » Une main désignait alors la direction la plus appropriée, l'autre bras s'ouvrant pour lui proposer un appui en cas de besoin, et une main vaguement protectrice.

@Anastasia Weiss

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Se croit-il épargné par les menaces parce qu’il a déjà fait le pire ou parce que les conséquences l’indiffèrent ? La question n’a pas le temps d’être posée, le corps de Cornelia posé au sol et la seule affirmation qui compte : ils vivront. Le soulagement se voit peu mais il envahit ses veines, parce qu’elle sait qu’elle n’aurait pas dû catapulter ces mômes de cette façon, parce qu’elle aurait pu leur briser les os ou, pire, déstructurer un membre dans l’expérience. « Lève le nez, et regarde. Ces petits drapeaux, les écrans géants. Je me suis arrêté de vivre parce que j'ai ces pouvoirs dans le but de les mettre au service des gens. Et les gens ne fêtent que mes plus échecs. » Les gens ne sont pas capables de nuancer, voudrait-elle rétorquer, simplement elle n’en a pas la foi, l’ombre du seul meurtre réel hantant l’angle de son esprit. Sans doute les gens ne fêtent-ils que ses plus grands échecs mais ils voient la puissance, la protection, une part de tout ce pouvoir qui les fait espérer. Espérer bêtement que cet être là s’intéresse à leur individualité ou leur offre les secrets de ce qu’il est devenu, dans les moindres détails. Elle soupire, un soupir las, un brin désabusé. Appuyée contre cette voiture, elle a l’impression de subir le violent contrecoup d’une lutte qui n’a pourtant pas duré si longtemps. Retenir l’instinct est plus difficile que laisser les capacités se déchaîner, en tirer un certain plaisir. Etait-ce cela qui rendait les boostheads si redoutables ? La bouche s’ouvre puis se referme quand elle réalise tous ces observateurs qui attendent la suite de l’aventure comme on s’installerait devant une série ou dans un fauteuil de cinéma.

Viens. L’ordre l’interpelle, elle pivote légèrement pour l’observer, le regard interrogateur, les yeux à nouveau de couleurs différentes - le gris uniforme s’est estompé après la dernière utilisation lumineuse. L’hésitation est palpable car si elle sait que les requins aiment le sang, elle est en quelque sorte de ceux-là, à noter tout ce qui lui passe sous les yeux, à compiler des informations et les sortir le moment venu pour des articles cinglants. Il ne sait probablement pas, il est bien au-dessus d’eux tous, dans la tour d’ivoire de la gloire, alors elle se détache du véhicule pour le suivre. Le contact l’empêche de trébucher une première fois puis une deuxième avant qu’elle ne se stabilise, que le décor retrouve sa clarté, que sa respiration reprenne un rythme raisonnable. Elle n’aime pas toucher les autres, Anastasia, elle n’aime pas se sentir vulnérable contre d’autres peaux, d’autres êtres. Les regards disparus dans leur dos, ses bras viennent se serrer contre sa poitrine, attitude repliée laissant entendre qu’elle a tendance à se protéger d’autrui, à s’isoler. « Je ne veux pas que les gens m’adulent. » Les premiers mots depuis de longues secondes, preuve qu’elle n’a pas simplement ignoré ses paroles. « Je ne veux pas devenir le quart de ce que vous êtes, sauf votre respect. » C’est probablement trop honnête et n’importe quel fan hurlerait devant un tel désintérêt pour ce qu’il représente. « Et je n’ai pas de mentor, de toute manière. Il y en a bien un ou deux qui ont essayé mais.. » Un souffle, une mèche blonde tachée de rouge qui flotte devant son masque. « Tout ce qui m’intéresse, c’est d’aider ceux dont tout le monde se fiche éperdument.. les bas quartiers n’ont pas besoin de grands éclats pour être reconnaissants, il suffit d’arrêter ceux qui font du mal à leurs enfants ou d’empêcher la destruction du peu qu’ils ont. » Le sang est à nouveau essayé sur le gant blanc déjà sali par l’anthracite du goudron craché par sa soeur. « J’espère qu’ils ont du bon détachant, chez Seraph. Le blanc c’est vraiment une idée à la con. » Elle parle trop quand elle est gênée, visiblement, quand Hemera se confond avec Asya, quand aucune des deux ne se sent à sa place. « Vous passiez une mauvaise journée. Vous n’aviez pas d'amis avec qui partager la morosité ? Ce look de stalker, il faut sincèrement que vous sachiez que c’est effrayant. Pas précisément vous, juste.. l’effet que vous faites avec les lunettes et la capuche. »

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@Maximillian Grayson

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❖  ❖  ❖Une fois encore, la main du Solar ne vient pas se porter d'elle-même sur la blonde. Il se contente d'être là, d'offrir sa stature en guise d'appui, un bras pour s'y accrocher en cas de besoin, mais jamais plus. On ne le prendra jamais, lui, à faire ce qu'on ne l'a pas tacitement autorisé à faire. Il est, d'un claquement de doigts, redevenu aussi lisse, corporate et trop parfait sous tous les angles, faisant corps avec son rôle de gendre idéal de l'Amérique... voire du monde entier ( osons : de l'univers, même ! )

Ils ne parlent pas, ni elle, ni lui tandis qu'ils tournent simplement le dos à la foule qui tente de s'approcher. Entre temps, les autorités ont commencé à arriver. Une ambulance et deux voitures de police avaient pu fendre la foule pour chercher à créer une périmètre de sécurité. Pour une fois, ils tombaient parfaitement bien. Max n'avait clairement pas la tête à affronter la populace maintenant. Il n'avait pas envie d'entendre les cris, pas envie de signer quoi que ce soit, pas envie de commenter, et pas envie non plus de revoir la tête de cette folle furieuse qui avait cherché à le tazzer simplement parce qu'il lui avait adressé quoi ? Quatre phrases ?

Le silence est rompu par Héméra. Elle ne veut pas que les gens l'adulent, annonce-t-elle. Il opine de la tête et hausse les épaules, vaguement désinvoltes.

« Je ne le voulais pas non plus. »

Pas de reproche dans la voix, pas de grand-messe pour essayer de lui faire entendre que la célébrité est formidable. Ce serait d'une hypocrisie terrifiante que de se laisser aller à ce genre de remarque ici, alors qu'il était évident qu'il s'était mêlé à la foule pour précisément éviter d'être reconnu.

« Je doute que qui que ce soit puisse devenir le quart de ce que je suis. » Reprit-il avec ce qui fut d'abord un petit soupir plein d'une arrogance consciente visant à simplement la surprendre et à lui arracher ce même genre de rire qu'il essayait d'obtenir lorsqu'il s'agissait de désamorcer une situation par l'humour – douteux parfois – dont il était pourvu. Ceci dit, de l'étincelle d'amusement, il ne demeura plus rien moins d'une seconde après.
Parce qu'effectivement, il n'y aurait jamais personne pour devenir le quart de ce qu'il était, et ça ne faisait que le rendre d'autant plus seul au monde.

« Tu devrais songer à trouver quelqu'un pour t'aider et t'aiguiller quand même... en gardant en tête ton propre libre arbitre. Et en observant les échecs des autres. C'est encore le meilleur moyen d'apprendre et de ne pas reproduire les erreurs commises ailleurs. »

Ce qui était... précisément une remarque de mentor, à bien y réfléchir. Il chassa l'idée de sa tête, réajusta un peu son pull avant d'approuver le discours idéaliste, cliché et... qu'elle finirait tôt ou tard par abandonner en constatant qu'aider les gens n'était pas aussi simple qu'on pouvait l'imaginer. Que dans la majorité des cas, aider une personne revenait à devoir s'opposer à d'autres. Et qu'il était très rare que les situations de ce genre se règlent autrement que par de la souffrance. Certains énoncent que la violence ne résout rien. Ceux-là sont certainement confortablement installés chez eux, dans un luxe suffisant leur permettant de ne pas rencontrer les individus à risque. Une fois confrontés au réel, ils ont toujours tendance à déchanter. Et aussi triste que ce soit... Héméra aussi. Tôt ou tard. Ceci dit... il n'était pas là pour tuer l'espoir. Le temps se chargerait de le faire. Autant la laisser rêver, et l'encourager à continuer.

« Garde cet idéal dans un coin de ta tête alors. Et fais en sorte de t'y cramponner autant que faire se peut. Il y a longtemps que je n'ai plus entendu une personne aspirer à aider sans vouloir la célébrité. »

D'une manière assez navrante, ça lui rappelait... son propre cas. Et c'était assez terrible pour elle, qui prétendait ne pas vouloir lui ressembler. Bien sûr, ça aussi il se garda bien de le lui dire. Et ses complaintes au sujet du costume et de la couleur furent une bien belle branche à laquelle s'accrocher pour ne pas en venir à du défaitisme primaire.

« C'est vrai que je n'ai jamais vraiment eu de problème avec le sang. Le mien n'est pas... » Rouge et affreusement voyant par contraste sur des couleurs trop clair. L'un des avantages de venir d'un autre système solaire « Je ne sais pas qui a fait ton costume. Mais... je pourrais te mettre en contact avec la personne qui a fait les miens. Elle ne s'opposera pas à la charte graphique qui est la tienne... » Il était à ça de dire la nôtre « ...mais elle pourrait te trouver des matériaux plus adaptés. Tout ce qui est fibres, c'est à éviter dans notre job. Trop salissant. Sans compter le côté pratique. »

Quant au look du sweat à capuche, même si elle semblait désapprouver, le Primordial, lui, baissa les yeux et ne chercha pas à masquer une certaine satisfaction. Dommage que les lunettes étaient mortes, que sa casquette avait sans doute été volée par quelqu'un dans la foule et que l'arc électrique du tazer avait amoché le vêtement.

« J'ai voulu essayer de me rappeler ce que ça fait d'être quelqu'un de normal au milieu d'autres gens normaux. Je ne peux pas vraiment rester incognito sans au moins une capuche et des lunettes de soleil. Je voulais quelque chose de simple. Un café trop chaud avec une faute d'orthographe sur le prénom que j'ai donné... me faire insulter pour un regard de travers... me retrouver devant des gens qui ne se sentent pas obligés de faire des trucs improbables parce qu'ils savent qui je suis. Je n’ai pas l'impression que c’est beaucoup demandé. »

Lui aussi, pouvait parfois trop parler. Sûrement parce qu'il aimait aussi pas mal s'écouter, d'ailleurs.

« Tu sais voler ? »

Qu'il finit par l'interroger. Parce que c'était encore, d'après lui, la manière la plus simple de fuir les rafales de photos et les cris des fans.  

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Il ne le voulait pas non plus et ce n’était pas tellement rassurant. La lourdeur de l’affirmation se heurte au trait d’humour, à l’image égocentrique que traine The Defender, dans toute sa gloire. Elle lève les yeux au ciel, exagérément, un sourire en coin, le souffle d’un petit rire au bord des lèvres. « Beaucoup en rêvent. » D’être le quart de ce qu’il est. D’être au moins un peu adulé, d’avoir un peu de sa puissance au bout des doigts - ces gens là sont inconscients. C’est probablement la raison pour laquelle elle fait la moue lorsqu’il évoque un mentor, quelqu’un pour l’aiguiller, observer les échecs pour apprendre. La tête se penche légèrement sur le côté, la cascade blonde suivant doucement le mouvement vers son épaule tandis qu’elle ose croiser son regard. « Qui croyez-vous que j’ai observé pour ne pas vouloir de ce vaste cirque ? Ce que vous avez dû faire.. » Les idées s’emmêlent, elle ne veut pas en dire trop, a pris l’habitude de ne jamais le faire, il lui faut quelques secondes de réflexion pour laisser filtrer sa réalité, celle qu’elle tente de dissimuler aux autres, feindre de n’être qu’un joli bijou forgé de rêves, de charme, de sourires chaleureux - feindre l’aura de l’ange qui tend la main aux enfants. « Je travaille toujours en duo mais je ne peux pas me permettre de m’attacher à quelqu’un. SUCLA était conçue pour.. mon genre de cas. La moindre action dehors pourrait tourner au drame. » Elle a probablement l’air un peu dramatique, surtout gênée de devoir confier une part d’ombre à ce parfait inconnu auréolé de gloire, dont la dangerosité avérée semble pourtant assumée, sous contrôle de son possesseur. Elle hausse les épaules. « J’imagine que la célébrité fait fantasmer ceux qui en ignorent les conséquences. Hemera est plus anonyme que la personne qui se cache derrière. Ca ne tiendra pas, j’en ai conscience, les lentilles peuvent dissimuler ce que je suis, les lunettes ont l’incroyable faculté à faire disparaître la réflexion des observateurs.. un jour quelqu’un fera le lien. Les bas-fonds ne connaissent pas les paillettes, du moment que les hautes sphères ne me remarquent pas.. » Le visage se baisse un peu. C’est en le prononçant qu’elle réalise l’erreur. C’est en l’exprimant qu’elle saisit l’étendue de ce qui pourrait lui tomber dessus à avoir été vue dans ce quartier où les sphères se mélangent, par deux fois. La banque, où elle était la fille étrange contre des braqueurs. La même avenue, là, brillant de la même manière dans ce costume si visible, près d'un Defender sorti sauver la mise. Elle se maudit intérieurement.

« Je ne sais pas qui a fait ton costume. Mais... je pourrais te mettre en contact avec la personne qui a fait les miens. Elle ne s'opposera pas à la charte graphique qui est la tienne… » Un rire, plus solaire cette fois. Un vrai rire, comme le cristal qui chante une légèreté dont elle paraît dépourvue, derrière la visible rigidité de ses valeurs. Il a raison, les fibres ne sont pas idéales mais ce n’est pas ce qui l’amuse. « Ma mère, probablement. En accord avec les équipes de Seraph. Je n’ai pas.. choisi tout ça. Sauf le masque, c’était la seule condition. J’ignore ce qu’ils ont voulu faire et, pour être honnête, ça m’était égal, l’important c’était de pouvoir venir en aide aux victimes. » Une mèche est ramenée derrière l’oreille de la jeune femme, un peu embarrassée. « C’est une opportunité qui ne se refuse pas. Mais maintenant que vous le soulignez.. ils auraient dû penser à éviter, eh bien.. votre esthétique. » Un froncement de sourcils, à l’idée qu’elle n’a pas envisagé l’image médiatique que traine ce blanc, qu’elle n’y a simplement pas songé en sortant de l’Université, modelée par des équipes auxquelles elle était habituée depuis son plus jeune âge - se faire habiller, mettre en valeur une création pour les tapis rouges ne lui avait pas semblé bien différent. Désormais plus pointilleuse sur son apparence civile, celle d’Hemera avait été laissée entre des mains plus expertes : leurs desseins parfaitement inconnus de la petite métahumaine étrangement conciliante malgré son caractère.

L’anonymat désiré. L’envie de n’être qu’un homme parmi une foule, sans que personne ne le calcule, sans que les comportements ne changent face à sa présence. A moindre échelle, elle pouvait comprendre. Si elle n’avait pas prétendu quitter le pays pour une université allemande, sans doute n’aurait-elle pas la paix relative accordée par son statut de journaliste et les frasques de sa soeur. « Vous n’êtes pas obligé de faire ça. » Un geste évasif de la main, le désignant dans son ensemble, cherchant comment exprimer ce qu’elle entend. « Redevenir.. parfait et lisse. Sans vouloir vous froisser. C’est probablement devenu un réflexe mais rien ne vous y oblige, là. Je ne suis personne et vous n’avez pas besoin d’être quelqu’un dans cette rue. Vous paraissez bien moins sympathique, en gendre idéal sans aspérité. » C’est plus difficile de lui être hostile, à proximité, loin des excès, des foules, des caméras, des drames en direct.

« Tu sais voler ? » Amusement visible au coin des lèvres, dans les prunelles mutines. « Non. Je n’allais pas tout vous emprunter, tout de même. » Elle pivote, marche à reculons pour pouvoir lui faire face, toujours tachée de tous côtés par l’expérience mais déjà plus joyeuse, en meilleur état émotionnel. « Comment ils ont vendu ça aux autres déjà ? Je tisse le Jour et détisse la matière. » Au bout des doigts se dessine un papillon lumineux, mirage venant voler autour du héros avec grâce, suivi de plusieurs autres qu’elle fait s’évaporer rapidement, paillettes éclatantes disparaissant dans l’air, lucioles enchantées. Son corps lui-même émet momentanément une douce lueur, une chaleur presque délicate. « Mais surtout.. je m’efface. Même si j’imagine que vous, vous continuez à me voir. » La silhouette s’est effacée, la lumière réfractée, seul moment où la signature n’émet pas normalement, détournée pour que l’oeil ne perçoive plus logiquement les contours. Astuce qui lui a sauvé la mise de nombreuses fois, fléau de ses heures de solitude où c’est un réflexe défensif. « C’est la partie.. disons agréable. Le reste.. n’est fait que pour détruire. » Les effets s’annulent, elle retrouve sa quasi normalité, peu désireuse de tirer sur la corde bien que les illusions demandent toujours moins d’énergie que manipuler les molécules. « Vous voulez un autre mauvais café ? Au point où on en est.. il y’a une chance pour que je vous en récupère un sans trop de casse. Je vous dois bien ça. »  

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« Ceux qui en rêvent n'ont rien compris. » Tranche simplement le dernier des Solars. C'est sans appel, la gloire n'est pas quelque chose qu'on doit viser, d'après lui, lorsqu'on se décide à vouloir embrasser ce genre de carrière. Pas plus qu'on doit s'attendre à être parfaitement heureux ou épanoui. C'est une vie au service des autres. Une vie de combat. Une vie d'échec aussi. Et le reste n'est que secondaire, dans le fond. Et la gloire, justement, n'est attirante qu'aux yeux de ceux qui ne la subissent pas. Ironiquement, la majorité même des gens qui rêve de célébrité est affreusement mal à l'aise face aux regards d'un ou une simple inconnu. Et peu ont l'esprit d'essayer de s'imaginer le poids réel de millions de mirettes braqué sur soi.

« Ce que j'ai dû faire devait être fait. »

Là aussi, le ton est plutôt péremptoire. Il aurait aimé que ce soit autrement. Il aurait aimé qu'il soit possible de négocier avec les sécessionnistes. Il aurait aimé qu'Atom renonce et n'en vienne pas à péter les plombs au risque de mettre la vie d'innocents en danger. Il mentirait même en disant qu'une partie de lui n'avait pas pris plaisir à certains aspects de cette horreur. Comme tout le monde, Max aussi a ses zones d'ombres. La sienne passe, et passera toujours par l'égo. Or, y a-t-il plus grisant pour le mégalomane que le pouvoir de dieu par exemple : le droit de vie ou de mort.

« Mais ça ne mérite pas des hourras et des relectures. Les gens ne devraient pas applaudir et se féliciter de ça. »

Alors elle était effectivement sur la bonne dynamique si elle souhaitait bien faire. Il n'était pas tout à fait certain en revanche qu'elle parvienne à garder le cap moral et préserver ses idéaux lorsque les choses finiraient par drastiquement se complexifier.

« Je note que tu as choisi de sacrifier ta vie plutôt que celles de la foule, en revanche. C'était... particulièrement stupide d'une certaine manière...» Il eut un sourire en coin. Franc, cette fois. Le genre qui servait surtout à marquer que dans ce cas précis, il fallait entendre l'inverse de ce faux reproche formulé. Seraph Inc répétait toujours que la sécurité de chacun était primordiale. L'argument majeur étant d'ailleurs d'expliquer qu'un héros vivant pourra toujours sauver des vies au cours de son existence, là où un héros mort en épargnant quelques personnes ne sauvera jamais plus personne. Probablement contractuellement, donc, il ne pouvait l'encourager à avoir ce genre de comportement sur le terrain. Ceci dit, il était évident qu'il était même plutôt impressionné par la décision d'Héméra. « ...mais ça me permet d'être sûr que tu as conscience de tes responsabilités. Alors... oui, certaines actions peuvent mener au drame. Mais si tu veux un conseil, c'est en craignant tes capacités que tu vas engendrer le plus de catastrophes. »

Et elle parlait à quelqu'un qui s'était découvert la capacité de découper tout et n'importe quoi grâce à des faisceaux laser qui lui sortaient des yeux. Autant dire qu'en termes de catastrophe ambulante, il se posait là lui aussi.
Beaucoup de maîtrise, une discipline de fer, et surtout l'expérience d'une utilisation régulière avaient été des clés particulièrement importantes afin de maîtriser ce don et d'éviter de transformer n'importe quel petit regard un peu trop appuyé en un homicide particulièrement sordide.

« Effectivement, les pouvoirs liés à la lumière et le costume blanc... ce n'était pas l'idée la plus lumineuse qu'ils aient pu avoir... »

Enfin si, justement. Ils avaient sans aucun doute pensé à la lumière la plus connue du moment : lui, et s'étaient contenté de mettre peu ou prou le même code couleur à la tenue de la petite nouvelle qui, elle aussi, avait un lien avec la lumière. Le design reste une question de business. Et ceux de Seraph Inc sont là pour faire de l'argent. Or, The Defender restait une poule aux œufs d'or. Même les contrefaçons flagrantes s'arrachaient à prix d'or.

« Mais vois le bon côté des choses : ils auraient pu te donner une couleur secondaire encore plus clichée. Tu t'imagines avec des revers et des lignages roses ? »

Et oui, il était à moitié sérieux de son affirmation. Parce qu'il savait que l'éventualité avait très certainement été envisagée.
Il commençait à les connaître.

Intrigué par ses propos le concernant, il arqua simplement un sourcil à l'entendre, avant de marquer son désaccord d'un signe de la tête de gauche à droite. Il ne pouvait pas ne pas être lui, tout simplement. Il avait eut la confirmation il y a quelques minutes à peine. Il n'y avait plus vraiment de Max. L'option n'était simplement pas envisageable. Le Defender prenait simplement trop de place et il n'y avait plus de place pour sa version la plus... humaine finalement.

« Je suis qui je dois être. Je me fiche que ce soit moins sympathique. Je suis supposé être un exemple. Je n'ai pas le droit d'avoir des aspérités. »

L'envie ne manquait pas, pourtant. Et son petit mouvement d'épaule, désinvolte en apparence, ne tromperait jamais personne à ce sujet. C'est à ça qu'on s'engage quand on a les responsabilités qu'il avait. Voilà tout.

Responsabilités qui, finalement mènent à échanger sur les pouvoirs de chacun. Quoique la question au sujet du vol visait surtout à savoir si elle était en mesure de quitter les lieux et la rue actuelle afin de s'éloigner au plus vite des plaies que pouvaient être les fans hystériques. Il était à peu près certain que lorsqu'ils s'étaient rendus compte de qui il était, la majorité des gens avaient contacté des proches. Sans parler des gens qui filmaient et diffusaient peut-être les images en streaming. Non, vraiment, rester ici allait vite devenir un problème.
Problème qu'Héméra et sa capacité à disparaître pouvaient gérer. En la voyant faire, il chercha à l'observer au travers des différents spectres de Lumière d'ailleurs avant d'agiter lentement la tête de droite à gauche pour lui répondre.

« Non. Je n'arrive pas à te voir lorsque tu disparais. Ton don doit sans doute être lié à un contrôle total de la lumière que tu renvoies. Et... si tu ne revois rien quand lumière, je ne peux rien capter. »

Il eut un léger sourire, en se penchant quand même légèrement pour ajouter :

« Mais j'entends ton cœur battre, même lorsque tu es invisible. Quant à ta faculté à détruire... je crois que tu ne devrais pas autant craindre tes dons. Tout s'est plutôt bien passé, aujourd'hui, quoi que tu en penses. »

Et il n'essayait pas juste de minimiser les choses. Certes, il y avait eut des dégâts. Mais la majorité d'entre eux n'étaient pas imputables à la jeune femme. Et personne n'avait été blessé. Certes... les crétins sous Boost allaient dormir deux trois semaines, comme tous les idiots persuadés qu'il s'agissait d'une grande idée que de s'essayer à ce genre de folie, mais elle s'en tirait bien. Et à une contre quatre en plus de ça.

« Je suis assez partant pour un autre mauvais café, oui. Mais il va falloir qu'on prenne de la hauteur si on veut le boire tranquillement sans dizaines de téléphones braqués sur nous. »

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Hemera aurait des choses à dire sur les hourras, les félicitations, la glorification de cette lutte mais elle se retient, se mord la lèvre inférieure pour ne pas laisser échapper le fond de sa pensée. Il a fait l’effort de tendre la main, le moment n’est pas propice à souligner qu’il n’est pas de ceux qu’elle admire, qu’il lui était même relativement antipathique dans toutes les apparitions médiatiques. Une part d’elle refuse peut-être d’être l’écho de cet homme, la version miniature, non-achevée, de celui qui reste le Phare de l’Humanité. Le rejet tient probablement ses racines tentaculaires dans cette phrase si lointaine laissant supposer qu’elle a été adoptée, qu’elle n’est pas la fille de ses parents, qu’ils ont fait preuve de charité en gardant l’anomalie sous leur toit. Il n’a pas besoin de le savoir, il n’en a certainement pas envie non plus. « Je note que tu as choisi de sacrifier ta vie plutôt que celles de la foule, en revanche. C'était... particulièrement stupide d'une certaine manière… » Contradiction entre les mots et l’attitude. Sourire en coin qui signale une sorte d’approbation, comme s’il ne pouvait se permettre de réellement la prononcer sans détours. « ...mais ça me permet d'être sûr que tu as conscience de tes responsabilités. Alors... oui, certaines actions peuvent mener au drame. Mais si tu veux un conseil, c'est en craignant tes capacités que tu vas engendrer le plus de catastrophes. » Il lui faut quelques secondes pour trouver une façon de lui répondre, une manière honnête de le faire, tout ce qui lui traverse l’esprit lui paraît trop grave, trop dramatique. The Defender, lui, n’est pas de ceux qui ont cette aura de défaitisme, d’horreur. Il se tient toujours parfait et souriant face au monde. « Je n’ai jamais été très disciplinée. » Ton mutin, pour amorcer une idée beaucoup trop sérieuse. C’est plutôt faux, en réalité, elle se plie aisément à l’image qu’on attend d’elle, s’orne de ce qu’on réclame, tente peu de révoltes frontales. Ses pensées sont indociles, personne ne les ébruite. « Ma vie ne vaut pas plus que celles de tous ces gens. J’ai une dette à payer. L’injustice de tout ce pouvoir que le hasard a mis entre mes doigts ne justifiera jamais que je sois épargnée et pas eux, bien au contraire. Je n’ai rien ni personne à perdre, ils laisseraient des orphelins, des familles endeuillées - je ne peux pas le permettre, ni vivre avec cette idée que je n’aurais pas fait tout ce qui est nécessaire pour les sauver. » Elle détourne les yeux, un instant, un peu embarrassée, le fantôme d’Alejandro revenu gratter les parois de son coeur, de sa culpabilité. Seraph et les armées d’avocats des Weiss ont tout fait pour que l’affaire ne s’ébruite jamais et ça la met extrêmement mal à l’aise, cependant personne ne peut entendre cette histoire, elle ne peut pas la raconter sans redevenir cette adolescente terrifiée, cette jeune femme dont l’impuissance s’est changée en sentence fatale. La crainte de ses capacités est nichée quelque part dans une zone d’ombre, muselée. Elle ne le connaît pas, ce serait plus facile, sans doute, mais que verrait-il alors ?

Il parvient à alléger la discussion, à la faire rire une nouvelle fois, l’arracher au coin ténébreux du passé. Rallumer l’étincelle de la gamine perdue dans les méandres de l’incompréhension de ce qu’attend Seraph, de ce qu’elle peut faire pour ne pas se perdre dans le labyrinthe. « L’angoisse. Barbie Super-Héroïne le retour. Ne leur donnez pas l’idée hein. » Le pire réside certainement dans le fait qu’elle parviendrait à le porter sans jurer dans les décors. « Je suis qui je dois être. Je me fiche que ce soit moins sympathique. Je suis supposé être un exemple. Je n'ai pas le droit d'avoir des aspérités. » Visage penché à nouveau, intrigué. Un froncement de sourcils en constatant la gestuelle. Ce n’était pas ce qu’il souhaitait, c’est évident, ça lui saute aux yeux comme si elle ne l’avait jamais regardé auparavant, comme si le sens du spectacle et la médiatisation avaient trop bien caché cette ridicule petite faille, si infime qu’elle en serait invisible dans d’autres contextes. Il est certainement temps d’être honnête. « Pour être franche.. vous m’avez toujours plus inspiré de méfiance que d’admiration. Cela satisfait peut-être l’Amérique entière que vous soyez parfait et lisse, à mes yeux c’est plus suspect qu’autre chose. Je ne peux pas applaudir les drames non plus. Et là.. vous êtes là, drôle et charmant, presque touchant. C’est déstabilisant. »  Un sourire en coin à son tour, un brin timide. « J’aurai des aspérité pour deux, puisque c’est ainsi. » Taquinerie plus douce. Elle n’est qu’humaine, qu’une créature de ce système, loin d’avoir l’histoire du surhomme venu d’un autre monde. S’il faut porter ses couleurs, être comparée, autant le faire avec panache, n’est-ce pas ? Ils l’oublieront vite, derrière la perfection pour laquelle elle n’a que peu d’attraits. Elle lui préfère cette dérision, cette sorte de discrétion parée de simplicité.

« Mais j'entends ton cœur battre, même lorsque tu es invisible. » Etonnement, d’abord, qu’il ne puisse pas la voir, que sa vision ne détourne pas cette capacité. Cela expliquait peut-être que ses parents, simples humains, n’aient rien perçu lorsqu’elle s’est trouvée bloquée dans cet état. Stupeur feinte, ensuite, choc exagéré, comédie joueuse. « Aurais-je donc un coeur ? Personne n’y croira, monsieur. C’est une idée insensée, que d’avoir une telle faiblesse ! » Bien sûr qu’il entend son coeur, de la même manière qu’on entendait ses pas ou les frottements des tissus si on y prêtait l’oreille. Devenir invisible impliquait d’apprendre à atténuer tout le reste. Face aux capacités de l’homme aux sens affutés, toutefois, elle ne pouvait que se trahir. Et puis il évoque les téléphones braqués sur eux, ceux qui ne manqueraient pas de les traquer dans le cas où ils voudraient simplement boire ce foutu café. « Ils ne vont pas.. Ils vont m’oublier, n’est-ce pas ? Vous étiez là et je ne suis qu’une anecdote dans cette scène. » Une forme d’inquiétude. Une crainte lointaine, un peu viscérale, d’attirer l’attention, de voir son monde broyé par l’écho médiatique, dans un reflet déformé par les rumeurs, ce que diraient la presse et les journaux. « Je.. vais vous chercher ce café. Pendant que vous.. j’imagine que vous allez flotter quelque part. » Flotter, oui, pendant que l’angoisse la fait disparaître, pendant que le voile protecteur sécurise une fragilité. Voler deux cafés n’est pas bien difficile dans des foules, les gens accaparés par leurs téléphones. Lorsqu’elle revient dans la rue, pour y réapparaître dans un clignotement laborieux, instable, il y’a un « Malwin » mal écrit sur le gobelet qui lui est destiné. Ils vont l’oublier, pas vrai ? tourne en boucle dans la petite tête blonde et elle a l'air coincée entre deux états : tantôt visible, tantôt non.

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C'est un regard songeur que Max glisse vers la blonde lorsqu'elle évoque un certain manque de discipline. Il ne sait pas vraiment s'il doit y croire ou non. Ceci dit, les faits tendaient à prouver qu'elle avait tout de même une certaine tendance à la rigueur. Et quelques valeurs bien ancrées qui commandaient des actions dignes des prétentions du rôle qui était le sien.
Et fréquenter Thunderbolt permet aussi d'affûter passablement sa capacité à cerner le second degré et l'ironie.

Dans le doute quand même, il préféra l'idée de se focaliser sur la tirade suivante, bien plus orientée premier degré. Et parfaitement en adéquation avec ses propres idées. Celles de la firme en revanche, n'allaient assurément pas dans cette direction-là. Au contraire, même. L'héroïsme oui. Mais à condition que ça ne risque pas de coûter la vie des petits prodiges alignés par la Corporation Seraphéenne.

« Je suis d'accord avec ça. Ceci dit, je me dois aussi de souligner que morte tu n'aideras plus personne. Et que ta vie aussi a une grande valeur. Et que le sacrifice doit être mûrement réfléchi... »

Peu de conviction derrière le sermon indiquait qu'il avait effectivement parfaitement bien consommé la bouillie rhétorique, mais qu'il ne l'approuvait pas. À quoi bon se prétendre héros ou héroïne si on occulte la notion de risque et qu'on ne met pas tout en œuvre pour essayer de sauver le plus de gens possible, au péril de sa vie s'il le faut ?
C'est ce que faisaient quotidiennement la police ou les pompiers par exemple, pour un salaire de misère considérant les risques et avec très peu de reconnaissance.

Quant au reste, il semble que l'idée d'une tenue rose permette de donner une petite chance à la tenue simplement blanche, arrachant un court, mais rire au dernier des Solars à l'entente de la réaction de la blonde.

« Promis, cette histoire restera entre nous. »

Il eut juste un bref plissement d'yeux. Du genre à essayer de se donner l'air d'un type sournois qui ment comme il respire, mais il fallait bien l'avouer... ce n’était absolument pas convaincant. Il avait l'air beaucoup trop... parfait pour ça. Ou quelque chose dans ce goût là.

Drôle charmant et presque touchant. C'est de cette manière qu'elle le définissait actuellement. Il eut une petite moue songeuse, et finit par hausser les épaules. C'était toujours mieux que rien. S'il comprenait ce qu'elle pouvait trouver désagréable dans cette image lissée et parfaitement parfaite, il notait aussi qu'il l'était ici aussi, actuellement, et qu'elle le trouvait moins bizarre. Le prisme de la télévision et l'orientation de l'oeilleton des caméras de Seraph Inc rendait toujours les choses étranges parce que la télévision et les apparitions médiatiques en général ont toujours cette fâcheuse tendance à drastiquement exagérer les choses.

« Je ne crois pas que tu aies autant d'aspérités que tu le dis, tu sais. Je veux dire... »

Il se gratta l'arrière de la tête, presque gêné d'avoir à lui expliquer qu'il ne la trouvait pas si différente de lui sur bien des aspects...

« Rends-toi à l'évidence, le costume blanc te va beaucoup mieux que tu ne le penses. »

Une sorte d'euphémisme bizarrement formulé, mais qui lui permettrait sans mal de comprendre où il voulait en venir. Parce qu'il était évident qu'elle avait agi comme une héroïne clichée tout droit sortie des pires élans propagandistes de Seraph Inc. Auréolée de vertu, courageuse au point de tenir tête à quatre personnes, refusant de les blesser, tout en mettant sa propre vie en péril pour éviter à la foule de souffrir des conséquences d'une situation compliquée...
Sans parler du fait d'oser se mettre entre le Defender en personne et sa sœur.

« Je ne crois pas qu'avoir un cœur est une faiblesse, tu sais »

Qu'il avait fini par rajouter, assez sérieusement lorsqu'elle avait badiné à ce sujet en réponse à ses explications.

« Ne pas en avoir c'est... »

Risquer de finir comme Hazel, très probablement. L'amitié l'empêcherait d'en dire plus.
Une chance que les petites inquiétudes – parfaitement justifiées – d'Héméra vis-à-vis des journalistes aient suffi à couper court à sa réflexion du moment au sujet de l'ex-Enchantress.

« Je ne crois pas qu'ils vont t'oublier, honnêtement. Et si on me pose des questions sur ce qu'il s'est passé, l'honnêteté m'obligera à rappeler que c'est toi qui a fait la majorité du travail. »

Le pire, c'est qu'il avait l'air sincèrement désolé. Sans son intervention, son exposition aurait probablement pu être reléguée au rang d'un sauvetage secondaire. Un titre dans un journal, quelques mots à la radio, deux trois interviews, un bref buzz d'une petite semaine avant qu'une autre flopée de cinglés sous Boost n'impliquent l'intervention d'un héros plus médiatisé pour faire encore plus de vues et de clics.
Mais non, il était intervenu, dans une tenue civile qui plus est. Du jamais vu depuis presque vingt ans maintenant. Les fans allaient s'arracher les images et d'une manière ou d'une autre, Héméra allait devenir la protagoniste d'un moment plus ou moins historique de l'évolution du Defender.

La conversation s'arrête là, puisqu'il est question d'une disparition, d'un café, et de l'idée qu'il flotte quelque part. Il leva les yeux, tourna bêtement sur lui-même pour regarder derrière lui, et se contenta de faire quelques pas de côté en se trouvant une petite alcôve contre les bâtiments, dans l'espoir qu'elle revienne vite et que des curieux ne débarqueraient pas en surnombre pour transformer une banale conversation autour d'un café trop chaud en un trouble involontaire à l'ordre public.

Compter les Mississippi, surveiller les alentours à l'aide de sa vision. Max finit par entendre la foulée de la jeune femme. Et il sentit l'odeur du café avant même qu'elle ne commence à se rematérialiser devant ses yeux.

« Malwin hein ? »

C'était la première chose qu'il avait vu. Un larcin donc, à tous les coups. Il haussa les épaules, et soupira. Allez. Une journée incognito peut bien se conclure par un petit vol de café. Il enverrait un chèque à son nom au café en question. Une offre généreuse. Ses intérêts à lui, pour ce petit vol de rien du tout, dira-t-on.

« Est-ce que tu veux... voler ? La vue de cette tour est plutôt sympa.» Qu'il se hasarda à suggérer en désignant l'immeuble le plus proche. Ni le plus petit ni le plus grand du coin. Mais il avait le mérite d'être suffisamment banal pour qu'on ne les remarque pas assis au bord, pieds dans le vide. Sa main se tendit d'ailleurs vers elle pour appuyer sa proposition, tandis qu'il tendait légèrement un pied, l'invitant à y poser le talon et à cramponner sa dextre. Un pied comme appui, une main comme prise.

De toute manière, il n'avait pas grand-chose de plus à lui proposer. Il ne disparaissait pas comme elle. Et elle ne volait pas comme lui.  
Enfin si, elle volait... des cafés.

@Anastasia Weiss

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Sa vie aurait une grande valeur. Dans la bouche de Defender, elle pourrait presque y croire. Presque. Elle ne peut pas oublier cet angle fatal de son esprit, ces années sous les doigts manipulateur d’un homme qui lui avait montré ses failles, en avait exploité les contours. Combien d’années avant de réaliser que ça n’avait pas été de l’amour mais du contrôle et de l’intimidation ? Combien d’années avant que le miroir aux mirages ne se craquèle et qu’elle voit en son entourage de savants joueurs tirant leurs cartes ? Seraph Inc lui avait, bien malgré eux, ouvert les yeux à SUCLA. Ce qu’elle avait vécu n’était pas normal. Et elle n’en avait jamais parlé. Sa vie n’avait de valeur qu’au prétexte des millions de dollars qui ne sortaient pas de sa mémoire, cette phrase morcelée, mal entendue, qui ne faisait d’autre sens qu’une adoption malheureuse. Le rire d’un autre chasse les ombres moroses, même bref. Parfois, elle se dit que ça pourrait suffire à illuminer son monde, la joie d’autrui, l’amusement, ne pas les effrayer, jamais. Lui ne peut pas avoir peur d’elle, c’est peut-être la raison qui la pousse à parler. Parler de ce qu’on ne dit pas aux gens de son genre, aux acolytes en quête d’éclat, de notoriété, à tous ceux qui peuvent trahir les secrets, actionner une faiblesse quelconque et causer un cataclysme interne. Le blanc de la pureté, le blanc de l’enfance aussi. Au regard de ce monde, elle est toujours cette enfant enfermée dans sa chambre, rendue invisible par sa propre peur. Le blanc en toile vierge sur laquelle peindre tous les rêves, aussi. Même des liserés de lumière rose pour éclairer les yeux des enfants.

« C’est facile à accessoiriser avec la lumière, le blanc. Quant aux aspérités.. il ne faut jamais perdre de vue qu’Héméra est fille des Ténèbres. Les multiples services de conception de l’image n’ont pas dû passer à côté du problème quand ils m’ont associée à.. ce genre de force primordiale née du Chaos. » Le Jour et sa beauté charmante, rassurante, dispersant le voile de la nuit, arrachant la terre aux terreurs de l’obscurité mais force créatrice qui aurait soudain oublié comment réparer ce monde sur lequel il faut veiller. Un petit sourire timide, les épaules se haussant légèrement. « Il faut avoir un peu de folie et de chaos en soi pour avoir la bêtise de s’opposer à vous, non ? » Il avait terrassé bien plus puissant, bien plus expérimenté, il l’aurait balayée d’un souffle s’il l’avait souhaité.

« Je ne crois pas qu'avoir un cœur est une faiblesse, tu sais. » Les lèvres pincées. Avoir un coeur lui semble offrir trop d’occasions à un adversaire de frapper, de déstabiliser. Aucune attache évite de s’en faire pour autrui. La distance et la solitude pour ne donner aucune prise, aucun moyen de pression. Elle n’a que Cornélia, qui ne se mettrait certainement pas en périls pour conserver ses secrets. L’angoisse grimpe pourtant, à l’idée d’une soudaine médiatisation, parce qu’elle réalise que si son téléphone était sur elle, ses collègues seraient déjà en train de partager des rumeurs, des infos, des images. Il faut qu’ils l’oublient. «  Je ne crois pas qu'ils vont t'oublier, honnêtement. Et si on me pose des questions sur ce qu'il s'est passé, l'honnêteté m'obligera à rappeler que c'est toi qui a fait la majorité du travail. » La panique sourde la pousse à s’échapper, concentrer son attention sur un objectif : le café. Le café pour ne pas réfléchir à tout ce qu’impliquait la présence du Phare de l’Humanité en civil sur les écrans. Elle reprend mal le contrôle d’elle-même, en revenant dans la rue, parce qu’elle ne peut pas croire qu’il veuille à ce point être honnête. Sans lui, l’histoire aurait tourné court, tout le monde finirait par s’en rendre compte, non ? L’air désolé qu’il lui avait offert, trop habitué à la célébrité, ne lui donnait pas le loisir de se leurrer. « Son date lui a posé un lapin, apparemment. » Malwin n’est pas venu et l’air dépité à la table n’aurait trompé personne. « On ne peut pas les laisser faire ça, vous savez ? Les laisser vous associer à une gamine qui brille.. et Seraph.. ils.. » Qu’en ferait Seraph ? L’entreprise avait toujours été une gigantesque entité menaçante, un monstre affamé avalant toutes les réalités sur son passage pour les recracher selon ses envies mais elle ne s’était jamais trouvée dans la spirale de véritables décisions. Jusque là, elle s’était même sentie plutôt libre d’exister, du moment qu’elle remontait le flux d’informations gênantes aux petites mains qui transmettaient. Sa déontologie journalistique pouvait s’accommoder de ce petit sacrifice.

« Est-ce que tu veux... voler ? La vue de cette tour est plutôt sympa. » L’information heurte la peur. Le flux est stoppé par l’incrédulité et l’image se stabilise. La lumière cesse de réfracter sa silhouette aléatoirement, la crainte infusée dans les veines retombe d’un cran et un pardon ? muet se peint dans ses yeux particuliers. Un réflexe idiot la pousse à regarder autour d’eux, comme s’il pouvait soudainement s’adresser à une autre personne qu’elle n’aurait pas vue. Enfin, son attention se pose sur l’immeuble, avant de revenir sur l’homme à la main tendue. La lumière est-elle plus forte, là-haut ? Est-ce qu’elle apaiserait les remous anxieux ? Est-ce que plus proche du ciel, elle se sentirait enfin en sécurité ? « Combien de groupies vous avez fait voler ? » Tentative de reprendre contenance par la taquinerie, air mutin en bouclier. Le stratagème est trahi par la prudence avec laquelle elle glisse la main dans la sienne, une sorte d’infinie douceur qui lui ferait porter le pseudonyme et le blanc en seconde peau sans l’ombre d’un doute. « Il paraît qu’il ne faut jamais refuser d’expérimenter.. même si ça frise le suicide. » Voler, c’est après tout le rêve absolu des humains, des simples mortels qui répondent trop souvent que c’est le don qu’ils aimeraient obtenir, s’ils pouvaient choisir. Voler ou être invisible. Charmante ironie.

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@Maximillian Grayson

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« C'est bien la preuve que les racines ne sont pas si importantes que certains le prétendent, alors. Et qu'on est ce qu'on veut être. » S'était contenté de répondre le Primordial à la tirade de la blonde. Surtout parce qu'au fond, c'était vraiment les choix personnels qu'elle ferait qui conditionneraient qui elle serait, et non pas ses pouvoirs. Sa pseudo-philosophie et sa connaissance des entités des mythes grecs s'arrêtaient là, de toute manière. Max restait un gosse de la campagne avec tout au plus deux années d'université au compteur. Du reste, s'il brillait, c'était surtout par ses actes que par sa capacité à intellectualiser les choses.

Quant au reste, il eut un petit rire avant d'approuver d'un signe de tête. Parce que oui, il trouvait aussi que l'idée de venir le confronter lui restait particulièrement folle. Et bête, comme elle le soulignait. Surtout si l'idée était d'espérer une victoire par la force, à bien y réfléchir.

« C'était quand même plutôt courageux, Héméra. C'est la seule chose qu'il faut retenir de ta décision. »

Parce que ça, il refusait de le lui enlever. Et qu'encore une fois, le courage restait une chose plus que primordiale dans la façon de faire et d'être de quelqu'un qui se prétendait Superhéros. 

« Ceci dit, ce serait de bon ton d'éviter de recommencer à l'avenir. »

S'opposer bêtement à lui, il voulait dire. Ou à quiconque était bien trop fort pour une héroïne encore toute jeunette.
Ce genre de talent, porté par des idéaux pareil, c'était bien trop rare pour être gâché. Et des gens excessivement braves, il y en avait plein les cimetières. Or, il préférait espérer qu'elle finisse par faire de vieux os. C'est tout le mal qu'il lui souhaitait.

Et puis il y eut cette histoire de médiatisation et sa disparition. La petite panique lue en elle au travers des battements de son cœur et des autres signes que des super-sens et une certaine proximité permettaient de repérer sans trop de problèmes. Ça et le fait de la disparition qui n'avait l'air d'être qu'à moitié volontaire, dans un sens.
Le tout l'amena malgré tout à avoir droit à un café.

« Je vais tout faire pour me convaincre que ce café a été sagement acheté » finit-il par lancer avec un petit mouvement d'épaule un peu désinvolte et un air un peu plus badin. « Malwin, c'est peut-être Maximillian très mal orthographié. Et qu'on ne respecte pas mon identité à ce point, c'est finalement un petit truc que vivent la plupart des gens quand ils vont s'acheter un café, non ? »

Non.
Ce n'était pas aussi commun qu'il avait l'air de le penser.
M'enfin, au moins il avait sa boisson chaude, trop sucrée, de qualité fort critiquable et d'une provenance encore plus douteuse, supplément conservateur et exhausteurs de saveurs. De quoi confronter son Super-Organisme de Solar à ce que le commun des mortels consommait.
Proposer un petit tour sur Air-Defender semblait être d'après lui la moindre des choses, amenant sans trop de surprise une réponse à la hauteur du caractère de la jeune femme qui suffit à lui faire avoir un petit rire.

« Uniquement les groupies qui ont un badge Platinium lors de la Seraph Fest. »

Il referma soigneusement sa main sur la sienne, et désigna son pied d'un petit geste de la tête.

« Fais tout ce qu'il faut éviter de faire pendant le slow de fin d'année et marche sur mon pied... sauf si tu veux  simplement être tractée vers le ciel par un seul bras, mais ça risquerait d'être désagréable. »

Et douloureux. Tout cet échange plutôt cordial qui mènerait à une méchante luxation d'épaule ? Ça ferait tache.
Il attendit donc qu'elle s'exécute, et laissa les règles de la logique et de la gravité au vestiaire en s'arrachant du sol lentement, pour une ascension qui, si elle pouvait sembler rapide pour un non-habitué, était tout de même passablement lente et mesurée pour lui. L'atterrissage se fit en douceur, sur le sommet du building indiqué où, comme supposé, la vue sur la ville avait quand même quelque chose d'assez appréciable. Les sons des voitures étaient atténués par la distance, le vent semblait plus fort et avait quelque chose de grisant. Et la vue permettait quand même d'aviser les alentours d'un point de vue plutôt peu commun. C'était comme se hisser au sommet de la Seraph Tower pour snober la ville, sans avoir à payer 250 dollars pour avoir le Pass VIP permettant de monter si haut. Et sans se retrouver serré à une infinité de touristes surexcités à l'idée de peut-être croiser un Primordial au détour d'un couloir.

« Je blaguais concernant le badge platinium. »

Finit-il par confesser en s'approchant du muret au niveau du rebord, qu'il enjamba afin de s'asseoir dessus, laissant ses pieds pendre dans le vide sans qu'une notion aussi élémentaire que le vertige ait une quelconque emprise sur lui.

« C'est assez rare que je fasse voler les gens pour le simple plaisir et l'amusement. La première fois que j'ai essayé en me pensant malin, ça a d'ailleurs été un désastre. »

@Anastasia Weiss

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Être ce que l’on souhaite lui semble idéaliste. Le choix d’identifier les mutations par une antique mythologie, pour certains d’entre eux, rappelait l’inéluctabilité de la destinée, le crépitement de trop de puissance au bout des doigts menant à la perte - ou à l’héritage, de rares fois. Elle n’était héritière d’aucun idéal, d’aucun grand nom, forgée par le hasard malheureux ; c’était tout du moins la manière dont elle se voyait. Le courage ne se départissait jamais d’une certaine forme de folie, ou de désespoir sans doute, pour celle dont les faibles accroches au monde se délitaient lentement. Qu’adviendrait-il lorsque sa mère et sa soeur en auraient assez ? Devrait-elle observer leur vie à distance ? Serait-elle l’oeil discret à l’angle d’une cérémonie de mariage ou à l’écart de la joie d’une naissance ? C’était tout le mal qu’elle souhaitait à Cornélia : savourer la paix et l’entourage dont elle paraissait tant avoir besoin. Sans elle. « Ceci dit, ce serait de bon ton d'éviter de recommencer à l’avenir. » Haussement d’épaules, petit sourire contrit. « Je ne peux rien promettre. » Ca lui échappe, si bien qu’elle se doit de préciser sa pensée, d’éclaircir ce qui ressemble à une provocation irréfléchie. « N’importe qui peut perdre la tête. La probabilité que ce soit moi est plus élevée mais.. s’il devenait nécessaire de se mettre en travers d’une route destructrice, alors.. » Alors il faudrait le faire. Essayer du moins. En parfaite conscience qu’elle se ferait écraser rapidement. « Gagner du temps permet à d’autres de vaincre. Je n’ai aucun ami super-héroïque, aucun affect, aucune attache. Personne à trahir. » Vision bien sombre, pour une jeune femme aux allures lumineuses. Leçon apprise en observant ces guerres, ces combats titanesques. Pas de mentor, pas d’équipe, colombe solitaire qui craint bien trop d’échouer, d’entamer une trajectoire menant au délire, pas de risque d’être quelqu’un et de devoir achever un ami. La volonté chevillée au corps de ne pas se démarquer l’a écartée des idées spontanées de Seraph Inc, elle aurait pu se révéler intéressante, montrer l’étendue d’un certain potentiel, un caractère susceptible d’intriguer le public - elle a lissé son univers, écrasé son individualité comme elle a appris à le faire entre ses parents, sur les tapis rouges, étouffé ses facultés dans la peur de dérailler ou d’exister. Invisible, observatrice, silencieuse. Une visibilité détruirait des années à ne pas se démarquer suffisamment pour que la firme, ogre insatiable, ne lui offre des idées folles. Suffisamment efficace pour se glisser dans les coeurs du petit peuple en détresse, pas assez pour se faire propulser au-delà.

La fuite se fait réflexe, en conséquence. Encaisser l’idée qu’on la connaisse subitement était plus facile que celle d’être vue par le prisme de The Defender, apparemment infoutu de mentir. Le gendre idéal, le parfait gars de l’Amérique. Une puissance démesurée dont cesser de se méfier était bien trop facile. « Malwin, c'est peut-être Maximillian très mal orthographié. Et qu'on ne respecte pas mon identité à ce point, c'est finalement un petit truc que vivent la plupart des gens quand ils vont s'acheter un café, non ? » Léger rire. « Je l'ignore. Personne dans mon quotidien ne se risquerait à mal orthographier mon prénom. » Non. Parce qu’il était écrit depuis sa naissance dans la presse, d’une part. D’autre part parce qu’un article qualifiant un café de médiocre ferait trembler les employés - alors même que ce n’est pas son sujet de prédilection, la qualité des services. Elle ne représentait pas tant la normalité dont Maximillian semblait désireux et elle s’en sentait presque désolée. La proposition de vol l’avait au moins empêchée de s’excuser pour ce fait contre lequel elle ne pouvait rien.

La remarque sur les groupies lui fait lever les yeux au ciel, plus par amusement, fausse exaspération que par réel agacement. Seraph était une entreprise, une machine à cash qui n’en avait jamais assez. « Fais tout ce qu'il faut éviter de faire pendant le slow de fin d'année et marche sur mon pied... sauf si tu veux  simplement être tractée vers le ciel par un seul bras, mais ça risquerait d'être désagréable. » Un battement de coeur raté la trahit. La crispation passagère aussi. Le bal de promo auquel elle n’a pas assisté. La danse qu’elle a arrêté, arrachant de son quotidien un réel exutoire. Danser, c’était vibrer, ressentir. Ca lui avait enseigné un rythme, une chorégraphie, la souplesse appliquée aux batailles. L’esquive contre un ennemi était parfois une valse savante. Elle obtempère, presque timide soudain. La proximité n’est plus une habitude, plus depuis.. l’image est à nouveau chassée et il lui faut étouffer une exclamation de surprise quand la gravité cesse d’avoir une emprise. Il est heureux qu’elle ne puisse pas broyer les doigts de l’homme durant le début de l'ascension.

L’atterrissage est un soulagement qu’elle n’aurait pu imaginer. Il lui faut plusieurs secondes pour que son estomac assimile la situation, que son cerveau enregistre la nouvelle position, la hauteur. « Je blaguais concernant le badge platinium. » « Vous êtes beaucoup trop cher pour ça. » L’amusement cache pourtant la réalité qu’il n’est parfois vu que comme un produit de consommation, de divertissement. La horde de fans au beau milieu d’un tel danger ne laisse pas de doute sur ce qu’on peut ressentir, quand on atteint son niveau. Le calme la détache de toutes les sensations négatives qu’elle ressentait dans cette rue, face au risque d’être vue, d’être remarquée, une forme de bulle tranquille l’enveloppe, happée par les rayons du soleil, par la lumière qui effleure la peau. « C'est assez rare que je fasse voler les gens pour le simple plaisir et l'amusement. La première fois que j'ai essayé en me pensant malin, ça a d'ailleurs été un désastre. » Les billes s’accrochent à son dos alors qu’il s’est installé au bord du muret, contre toute notion de prudence. Une hésitation flotte. Il y a le héros, gravé dans son esprit, l’image iconique sur tous les écrans, le type auréolé d’égo, et puis il y a ce mec là, dans un hoodie qui n’a pas bien vécu la débâcle, qui pourrait avoir l’air normal si ses traits trop parfaits n’étaient pas insolents. Un soupir lui échappe avant qu’elle ne s’approche, à pas prudents. « La légende raconte que vous ne faites pas d’erreur et que tout désastre est calculé. » Elle vient s’appuyer contre le muret, ne passe pas par dessus, ses sens peu enclins à accepter l’absurdité d’une telle hauteur face au vide. Elle ferme les yeux, comme si la clarté du ciel avait une saveur particulière, comme si le monde ne pouvait plus atteindre la part anxieuse de son âme. « Est-ce que vous regrettez, parfois ? » Ses pouvoirs, son influence, la manière dont s’est tracée sa vie. Il a l’expérience qu’elle ne possède pas, d’une existence sous les griffes impitoyables de Seraph. « Je suis navrée pour le reproche, tout à l’heure. Depuis que j’enquête sur le boost, tout ce que je vois, c’est la détresse qui se heurte aux rêves brisés. »

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@Maximillian Grayson

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C'est un léger sourire qui vint ourler les lèvres du grand blond aux propos de l'héroïne. Cette fois, il ne chercha pas spécialement à la ménager. Alors, avec une petite moue entre l'air navré et un petit côté un peu moqueur, il répéta d'abord ses propos :

« Si gagner du temps permet à d'autres de vaincre... » Un silence d'une petite seconde ou deux lui donna l'opportunité de faire mine de réfléchir. « C'est drôle, mais... c'est mot à mot ce que j'ai dit à Crimson Sorceress quand Atom a commencé à dérailler. »

Le petit sourire narquois qui suivait donc n'était là qu'en écho de ses paroles d'un peu plus tôt, où elle assurait ne pas vouloir lui ressembler et le prendre pour modèle des choses à ne pas faire.
D'un balancement d'épaule un peu nonchalant, il se contenta de faire comprendre que dans le fond, ça n'était d'ailleurs pas si grave. Viendrait bien un jour, dans quelques années, où elle comprendrait ce qu'on lui avait fait comprendre à lui aussi.

Des histoires de pouvoirs. De responsabilités. D'obligations. Que des raisons d'accepter d'embrasser cette vie avec ce qu'on en apprécie, et ce qu'on pourrait préférer ne pas vivre. La manière dont elle le faisait jusqu'ici n'était pas aussi opposée de celle de Max, qu'elle devait le penser.
Et il préférait s'en amuser un peu, il faut dire. Parce qu'à voir sa réaction face à la notion de célébrité, un peu de badinerie ne serait pas de trop pour lui faire avaler cette couleuvre-là.

C'est fort de tous ces échanges qu'ils finissent par s'élever et rejoindre le calme relatif des hauteurs. Un autre point de vue sur le monde. Et surtout, une retraite particulièrement appréciée, à l'abri des regards indiscrets et des oreilles de la faune locale. Pas de flash de lumière dans tous les sens. Pas de hurlement de fans. Pas de foule à contenir. Pas de sourire à afficher en toute circonstance. Et pas de courbettes dans tous les sens.
Il serait faux de dire qu'il détestait qu'on l'aime. Mais la normalité pouvait avoir un côté particulièrement apaisant. Le fait est que les gens l'enviaient tellement que personne n'était réellement en mesure d'entendre cette logique.

« Je doute que qui que ce soit puisse réellement se payer un vol de ce genre, pour être honnête. »

En fait, quand il le faisait gracieusement ou par nécéssité, les choses ne posaient pas plus de problème qu'une vague question de responsabilité civile. Mais il avait entendu parler tellement souvent de détails bizarres et complexes des rouages administratifs qu'il était aujourd'hui persuadé que s'il en venait sincèrement à vouloir monétiser une prouesse, alors il faudrait que le prix soit ahurissant pour compenser les milliers de dollars d'assurance, de droits et d'encadrements légaux pour pouvoir réellement le faire.

Et le simple fait qu'il était presque capable de chiffrer ça montrait tout à fait à quel point certains aspects de cette vie étaient absurdes et effrayants.

Finalement, ça pouvait aussi expliquer sa lassitude du jour, et l'air un peu usé qu'il pouvait avoir en se tenant là, assis comme un quidam le ferait sur un muret... avec un vide mortel sous les pieds en profitant d'un panorama que peu de gens pouvaient se vanter de contempler. Et à s'amuser d'une petite remarque pleine de sarcasme qui lui fit lentement agiter la tête de droite à gauche.

« Je n'étais pas encore le Defender quand c'est arrivé. Et Seraph ne me couvrait pas. »

Qu'il pensait.

« Et rien n'était calculé, c'était justement ça le problème. »

Il amena le café à ses lèvres, avala une lampée qui lui arracha une petite grimace de dégoût. Le café était trop fort. Chimique. Trop sucré. Dégueulasse, pour être honnête. C'était parfait.

« J'avais à peine vingt, je voulais faire un truc un peu fou pour des fiançailles. La bague au doigt avec un coucher de soleil au dessus des nuages. »

Il se tourmenta à nouveau le gosier avec quelques lampées affreuses, et comme pour la vodka, il sembla qu'il s'habituait assez bien au goût et aux effets désagréables sur son palais puisqu'il ne grimaça pas du tout cette fois. Il n'empêche que Malwin n'avait pas qu'un nom pourri. Il avait aussi très mauvais goût en matière de café.

« J'avais pas prévu qu'il faisait si froid pour une humaine à cette hauteur. Pas plus qu'il ne fallait prendre en compte des notions comme... l'accélération, la force des G, le manque d'oxygène au dessus d'un certain palier... et l'hystérie des gens qui ont une peur bleue du vide... »

Il haussa les épaules. Au moins, April ne lui avait pas trop voulu à l'époque. C'était déjà ça.
Et la voilà qui le fit taire avec une question courte et on ne peut plus simple. Il se contenta de tourner la tête vers elle, mutique, et de la fixer de longues, très longues secondes durant lesquelles il était évident que tout son esprit essayait de mesurer le pour et le contre. De trier. De trombiner. Et à bien y réfléchir, le simple fait de le faire répondait déjà à sa place.

« Parfois, oui. »

Mais regretter ne l'empêcherait pas de continuer. Il n'avait pas vraiment le choix.

« J'aurais pu continuer l'université. Prétendre être quelqu'un de normal. Le journalisme m'intéressait pas mal. Mais quand on sait fait ce que je sais faire, rester à regarder et prendre des photos c'est simplement indécent. Et je crois pas que j'aurais pu me regarder dans une glace tous les matins en sachant que mes pouvoirs me permettaient d'aider des gens. Je ne suis même pas réellement humain. Prétendre l'être en ayant une vie normale, ça n'aurait pas été bien. »

Il faisait ce qu'il devait faire, plus que ce qu'il voulait faire, et tant pis. Il y a des gens qui ont par ailleurs des obligations moins envieuses que les siennes. Et il se sentait assez mesquin, là, sur ce toit, à s'en plaindre comme il le faisait.

« Et tu ne devrais pas avoir à t'excuser d'avoir un avis. Le fait qu'on ne le partage pas n'implique pas d'avoir à demander pardon, tu sais ? »

Peut-être que sa vérité n'était pas si fausse que ça après tout. Il eut un nouveau mouvement d'épaule, parfaitement désinvolte. Le dernier. Il avala les gorgées de café restantes, et se redressa un peu, comme si cette petite parenthèse devait avoir une fin et qu'il devait se reprendre. À commencer par se tenir assis, moins voûté. 

« Il y a une vieille casse, un peu à l'est de Pasadena. Elle sert principalement à se débarrasser des véhicules détruits pendant les cascades lors du tournage de film. Qu'est-ce que tu dirais de m'y retrouver d'ici quelques jours ? » Oui... ça pouvait semblait passablement bizarre, et il n'avait pas vraiment l'air d'en avoir quelque chose à faire. « Tu as visiblement des choses à maîtriser liées à ta mutation. Il y a des tas de carcasses lourdes qui ne demandent qu'à être utilisées. Et par chance... je suis tout puissant et tu ne pourras rien me faire de trop fâcheux. Tu vois où je veux en venir ? »

@Anastasia Weiss