Metal, glace & feu (Ft Joan)

C'est la première fois que tu ressors la nuit pour veiller sur la ville depuis que tu as emménagé chez Vega. Tu t’es tenu à carreau jusque là, de peur de te trahir et de lui faire prendre conscience des risques qu'elle prend en t’acceptant sous son toit. Alors certes, tu as fait des promenades nocturnes, mais c'est principalement dans son quartier que tu as traîné, gardant l’oeil ouvert sur les news dans les journaux et les communications de Seraph. Ce qui t’a décidé aujourd'hui de sortir, c'est un tout. Un tout dangereux qui te fait utiliser ton pouvoir sans réfléchir. Un tout, mélange des derniers événements en ville, et de la présence de la brune qui devient de plus en plus… dure à supporter.

Il y a eu des attentats la nuit du 4 juillet et tu n’as pu intervenir qu’en fin de nuit, tant tu craignais d’aggraver les choses par ta présence. Puis la tension en ville. Ta propre inquiétude pour les autres héros de la firme qui, eux, s'étaient mis en première ligne et avaient été impactés. Et puis un autre problème parfaitement personnel. Ta colocation ne se passait pas… bien. Enfin en surface si. Tu faisais probablement le colocataire parfait : aidant, a l'écoute, discret… mais en toi, le Dragon ne cessait de rugir à chaque apparition de la jeune femme, te donnant de sérieux coup de chaud et des émotions brûlantes a gérer.

Donc voilà. Ces pensées parasitent ton esprit alors que tu utilises ta force de mutant pour courir à travers les rues de L.A. Tu as vu, via les réseaux sociaux et un piratage discret des communications de polices, qu'il y avait du grabuge dans l’Eathside. Tu te dis qu’en intervenant là-bas, tu auras autre chose à penser… parce que tu continues à ressasser sans faire attention à ton environnement.

C'est comme ça que ça arrive. Tu traverses la route comme un boulet de canon, pile quand une grosse voiture déboule. Les phares t’aveuglent complètement et avant que tu ne comprennes, ton corps réagit au choc qu'il va y avoir et mute. Les écailles sortent sur ta peau a une vitesse que tu n’avais jamais envisagée. Ça te gratte, te déchire l’épiderme et avant que la gêne ne te dévore la voiture vient s'écraser contre toi et si le choc ne te tue pas, elle te laisse sonner sur le sol.

Tu remets ton téléphone en place tant bien que mal après avoir tapoter ton message, ce n'était pas nécessaire et encore moins urgent, mais tu y as pensé plus tôt dans la soirée et depuis, ça te hante, et ça te torture l'esprit. Il fallait que tu le fasses, histoire d'avoir la conscience tranquille et d'arrêter de trop cogiter. Tu bosses, Jo'. T'as besoin de toute ta concentration.
Dans l'habitacle, la radio hurle des demandes d'intervention ici et là à travers L.A, tu écoutes attentivement. Dans l'Eastside, c'est plutôt calme en général, ce soir tu t'estimes relativement chanceuse de ne pas avoir à effectuer ta patrouille nocturne dans le Sud, parce que quand c'est le cas, tu passes ta vie à courir, à tirer, et à conduire bien trop vite. Tu adores ton boulot, mais ce soir, tu n'as pas envie de ça. En ce moment, tu aspires à un peu plus de calme même ce qui, malheureusement est peine perdue dans ton job, ce soir y compris.

Alors que tu t'engages dans une rue que tu connais plutôt bien, dans l'espoir de pouvoir faire un arrêt rapide à l'épicerie de nuit, un appel attire ton attention. C'est à deux rues d'ici, tu es probablement la plus proche … Un lourd soupir s'échappe d'entre tes lèvres, et tu attrapes le gyrophare que tu viens coller sur le toit de ton SUV noir, la sirène de la voiture retentit et ni une, ni deux, tu fais demi-tour sur la route pour prendre l'adresse indiquée. Une main sur le volant, tu saisis la radio pour signaler que tu es en chemin et quand tu la reposes, c'est ton téléphone que tu viens saisir parce qu'un message est apparu sur l'écran.
Parce que tu ne peux pas t'en empêcher, de toute évidence, tu commences à répondre, tu envoies un premier message, et puis tu commences à en taper un second à la suite. Tu as malheureusement quitter la route des yeux trop longtemps, parce que tu ne vois pas ce type qui traverse - n'importe comment, signalons le - tes doigts dérapent sur l'écran de ton téléphone et tu le lâches. L'appareil finit sur le tapis, au sol, côté passager tandis que tu écrases la pédale de frein.
Trop tard.
L'avant de la voiture percute de plein fouet ce pauvre bougre qui fait un vol plané en arrière. Ca ne dure qu'une fraction de secondes, et le silence retombe. « Oh non putain … » Tu quittes immédiatement la voiture pour te précipiter sur le blessé et vérifier son état, tu tombes à genoux près du type. « Est-ce que vous m'entendez ? Monsieur ?! »

T’as même pas le temps de comprendre ce qu'il se passe. Tu sens ton corps réagit avant ton esprit et en y réfléchissant à tête refroidie, ça te montrera que le Dragon est toujours là, toujours à deux pas de toi, à surveiller tout ce qui t’entoure. C'est lui qui te fait muter, pourtant il ne parvient pas à prendre le contrôle de toi car le choc avec la voiture vous met K.O et le repousse au fond de ton âme.

Ensuite, tout est flou pendant un moment. Ta tête tourne et l’inconfort de la pousse des écailles sur ton corps te tirent dans tous les sens. La surprise et la peur passent et montent en toi. Puis la douleur, pas si forte mais qui te fait comprendre ce qu'il s'est passé. Ensuite, le Dragon tente de reprendre les rênes avec la colère et c'est ce qui te ramène à la surface en même temps qu'une voix qui se fait entendre près de toi. Une femme. Qui s’inquiète pour toi.

“Qu’est-ce qui se passe ? Ta voix est plus grave qu'à l’accoutumée et c'est ce détail qui te fait comprendre que tu n’es plus complètement toi même. Oh putain, non… Tu t’assieds d'un coup, te retrouvant nez à nez avec une brune inconnue. Vous êtes blessée ? Tes yeux vont jusqu'à sa voiture dont l’avant est bien embouti et fume. C'est moi qui ait… fait ça ?”

Heureusement que le choc te tient toujours, parce que tu restes en maîtrise de toi-même pour le moment.

Il bouge, et quand il remue, ça retire une partie du poids que cet accident vient de poser sur tes épaules. Il est vivant. Avec la violence du choc, tu t'imaginais déjà l'avoir tué sur le coup, et c'est une chose qui aurait pesé sur ta conscience pour le reste de ton existence. L'explication de sa survie vient rapidement, cependant, lorsqu'il se redresse un peu, tu constates cet œil d'une couleur plus qu'anormale, sans compter cette peau qui n'a rien … d'humaine. Un méta. Tu souffles, ça te soulages un peu, même si ça ne veut pas dire qu'il n'est pas blessé, que sa vie n'est pas en danger.

« Vous avez eu un accident. » Tu commences par expliquer. Il scrute ta voiture, et tu en fais de même. Elle est complètement fichue, tu ne repartiras pas au volant ce soir. Fait chier. Pensée égoïste mais qui explose dans ton esprit, qui s'impose, de même que l'idée qu'on t'attends encore sur l'intervention, que tu dois prévenir de ton accident. « Moi … ? C'est pour vous qu'il faut s'inquiéter. Vous pouvez bouger ? Vous avez mal quelque part ? Je ne vous ai pas vu arriver, et je roulais vite. » A raison, parce que tu es autorisée à le faire pour une urgence. Ton erreur ? Tu ne regardais pas la route, tu envoyais un message. « Techniquement … C'est plus moi que vous. Mais où est-ce que vous courriez comme ça ? Vous êtes sorti de nulle part. »

Comme toujours, quand la transformation opère, tu es rapidement en surchauffe. Ta peau te gratte, l’envie d’arracher ton épiderme se fait ressentir. Heureusement pour toi, tu es bien trop choqué des évènements pour te faire complétement happé par cette volonté primaire de gratter au sang.

Du coup, ouais, tu as eu un accident, qu'elle te dit. Il te faut quelques secondes pour remettre de l’ordre dans ton esprit et puis tu finis par hocher la tête a ses questions sur ton etat. Tu remues, grimaces un peu en sentant ton dos douloureux, ça irradie dans ton flanc, mais tu as connu pire.

“Rien de grave, je suis résistant. Tu lui apprends sans te douter qu'elle en sait quelque chose. Je ne vous ais pas vu venir, moi aussi j’allais vite et… Encore une fois, ton regard va a sa voiture. Je suis vraiment désolé pour votre voiture, elle a l’air en mauvais état.”

C'est peu dire. Et tu sais déjà que tu vas t’arranger pour lui laisser de l’argent pour couvrir les frais de garage ou de rachat. De toute façon, Icare, tu gagnes très bien ta vie et tu ne fais rien de cet argent, autant que ça lui serve.

“Hm… Tu l’observes quelques instants. J'ai entendu qu'il y avait du grabuge dans le quartier, alors j'allais voir si je pouvais aider. Ton visage a fini de muter pour l'instant, tes traits sont plus fins, plus reptiliens. J’essaie de faire ce que je peux a mon niveau. Vous voyez le genre ?”

Tu as une honte suprême a oser te dire super-héros. Tu ne te sens pas légitime d’utiliser cette appellation alors tu dis toujours simplement “donner un coup de main” quand bien même ça te prend toutes tes nuits par période.
En attendant, mon vieux, tu te remets enfin debout et tu fais quelques pas vers son SUV dont l’avant a rendu l’âme, clairement. Et c'est là que tu captes le girophare qui clignote encore malgré qu'il ait glissé du toit de la voiture.

“Vous êtes de la LAPD ? Tu t’inquiètes d’un coup.”

Tu as vraiment percuté une flic, Icare ? Tu voudrais écrire une mauvaise blague que tu n'aurais pas mieux fait.

Le soulagement vient doucement mettre un peu de baume sur le feu de l'inquiétude et de la peur. Renverser quelqu'un à cette vitesse, tuer quelqu'un sur la route, c'est anodin pour personne, ça pourrait ruiner ta vie autant que ta carrière. S'il était mort sur le coup, c'aurait pu être la fin de tout. Alors quand tu te rends compte qu'il est conscient, qu'il peut parler et former des phrases qui ont du sens, ça te rassure.

Pour autant, tu as bien conscience que cette situation pourrait encore tourner au cauchemar, alors tu ne relâches pas ta vigilance. « Je vois ça … » Parce que maintenant, tu remarques les détails qui font que cet homme là à clairement plus de ressources qu'un être humain lambda. « Oubliez la voiture, c'est vraiment rien du tout. » C'est complètement faux, tu enrages et tu évites même de regarder pour le moment l'état général de ta voiture. Elle est foutue. Complètement fichue. Et tu enrages. Contre tout et tout le monde, la terre entière, lui, toi.

Tu finis par soupirer. Vous alliez dans la même direction de toute évidence, et tu comprends bien vite que ce type est l'un de ces pseudos héros de Seraph qui passent leur temps à essayer de te voler la vedette dans ton boulot. Pas que t'ai envie d'être mise en avant et que tu sois en mal de reconnaissance, non, plutôt que c'est ton travail et que tu veux le faire toi-même, comme une grande, parce que ton insigne t'as bossé pour l'obtenir.
Quoi qu'il en soit, tu ne dis rien du fond de ta pensée. Il se lève et tu l'imites, tu le suis. Et cette fois, tu as tout le loisir de constater les dégâts sur la voiture. Tu sers les dents.
« Exactement … Permettez d'ailleurs, je dois signaler l'accident, j'étais attendue. » Sans le sortir de ton champ de vision, tu te glisses dans la voiture pour attraper la radio, tu balances un message sommaire avant de te pencher pour récupérer ton téléphone sur le tapis de sol. Tu tapotes un rapide message, avant de ressortir de l'habitacle. Dans ta main, déjà, ton téléphone s'acharne et les vibrations se multiplient.

« Je vous écoute. On fait ça dans les règles … ? J'ai les papiers dans la voiture. » Ouais t'es de la police, et ouais t'es intègre mais dans cette ville les accidents, parfois c'est plus simple quand on s'arrange. Dans ton cas, la voiture est fichue dans tous les cas. « Est-ce que je dois appeler une ambulance ? » Le téléphone vibre à nouveau, et tu soupires, le temps de répondre. « Excusez-moi … » Tu tapotes nerveusement sur l'écran pour suivre la conversation par messages. « Je vous aurais bien proposé de vous emmener à l'hôpital mais c'est compromis … J'appelle une ambulance ? Vous ne devriez même pas être debout. »

Oublier la voiture. C’est facile à dire, mais à chaque fois que tu regardes la carrosserie, tu ne vois que la trace presque trop claire à tes yeux de tes épaules et de ton dos. Tu as littéralement laissé ton emprunte sur le pare-choc avant (en tout cas, plus tu regardes, plus tu te dis ça) et ça te fait drôlement chier. Mais alors, Icare, quand tu comprends que c’est une policière que tu as arrêté dans sa patrouille, là, c’est le pompon. C’est même pas que tu as peur pour toi (bon, une arrestation, ça ne ferait pas bien glorieux dans ta carrière déjà pas bien incroyable), mais tu te rends compte que tu l’empêches de faire son boulot. Et ça, tu vois, c’est extrêmement dérangeant. Tu fais partie de ces héros qui pensent que vous devriez travailler à égalité avec les forces de l’ordre et tu respectes sincèrement leur engagement.

« Je suis désolé. »

Encore une fois, c’est ça qui ressort en premier de ta bouche, alors qu’elle, elle va prévenir ses supérieurs, puis elle récupère son téléphone. Et tu ne remarques même pas qu’elle semble un peu trop concentré sur son écran. Tu es juste comme un grand idiot devant elle, à frotter ton flanc plus par instinct que parce que tu as une trop grosse douleur.

« Dans les règles ? Vous voulez dire un constat ? Tu recules d’un pas, pas du tout friand d’inscrire ca quelque part de manière officielle. Vous prenez les pseudonymes ? Tu l’interroges, en laissant clairement voir ta volonté de ne pas donner ton identité officielle. Franchement, on peut pas faire ça à l’amiable, comme deux adultes honnêtes et intègres ? »

Tu commences enfin à sortir de ta torpeur, dûe au choc, et la fièvre se fait sentir. Tu n’es pas encore en perte de moyen, tu sens que le Dragon est tapi au fond de toi mais il n’essaie pas de te faire brûler tout ce qui t’entoure. Tes yeux finissent par revenir à son téléphone, et une autre angoisse perce, qu’il parvient à atteindre cette fois : la peur qu’on divulgue cet accident et ta part de responsabilité là-dedans.

« Vous êtes en train de raconter ça sur les réseaux ?! Tu demandes tout à coup, alors que tes yeux semblent prendre de la couleur, briller dans le noir comme deux billes vert-jaune. Je suis un mutant, ce n’est pas un si gros choc. Tu secoues la tête. Je ne veux pas d’ambulance ! Je veux partir. Tes sourcils se froncent et ton changement d’attitude est peut-être un peu trop rapide pour sembler normal. Donnez-moi votre nom, je m’arrangerais pour vous régler ce que je vous dois ! Tu exiges, alors que le Dragon, lui, se repait de ta paranoïa, prêt à lancer une attaque contre toi d’ici peu. »

Un accident de la circulation, pour la majorité de la population c'est déjà le truc à éviter parce qu'en dehors de l'aspect santé, une fois la mort et les blessures écartées, c'est l'aspect financier qui entre en ligne de compte. Personne ne veut avoir à rembourser une voiture, personne ne veut avoir à se mettre dans la mouise pour des histoires d'assurance. Mais toi, Jo', t'es flic et t'es censée montrer l'exemple, même si t'as pas envie d'être inquiétée de tout ça, pas envie qu'on porte plainte contre toi, bref. Au fond, si vous pouviez juste vous débrouiller et régler ça tranquillement …
D'autant qu'à côté de ça, une partie de ta concentration se trouve happée par la conversation que tu entretiens tant bien que mal via ton téléphone portable. Tu dois avoir l'air sacrément impolie, mais t'as fait l'erreur de parler de cet accident à Clay' et tu sais que si tu te mets à cesser de lui répondre, il va réellement alerter la Terre entière pour te remettre la main dessus.

Fort heureusement pour toi, le pauvre bougre que tu viens de renverser ne semble pas plus désireux que toi de faire une tonne de paperasse … Tu fais mine de hausser les épaules. « On peut faire ça, pourquoi pas … » Tu finis par soupirer, tu viens de donner l'adresse de l'accident par message, pas que t'as besoin d'aide pour gérer la situation, non. Mais ta voiture est morte, et t'as bien besoin de quelqu'un pour te ramener. T'aurais pu prendre un taxi mais … Ouais.

Cela dit, le fait que tu sois un peu trop concentrée sur ton téléphone, ça finit par alerter ton interlocuteur, et dans le mauvais sens. « Les réseaux ? Non … Non c'est … » Ton téléphone vibre à nouveau, tu avises le dernier message du coin de l'œil. « Mon mari visiblement. Il s'inquiète. » Ouais, tu prends ça à la rigolade, mais tu fais l'effort de ranger ton téléphone dans ta poche. Parce que tu sais quoi ? A vouloir te fuir autant, tu commences à te dire que c'est peut-être pas de l'accident qu'il veut s'éloigner rapidement mais de toi, la flic. « Je vous donne mes infos si vous me donnez les vôtres. » Et tu vois, finalement, tu suis les directives de Clayton, tu gagnes du temps pour éviter qu'il ne s'enfuit. Tu refais le tour de la voiture pour aller récupérer un carnet et un stylo et tu commences à noter ton nom, ton prénom, ton numéro … tout ça en prenant tout ton temps et en raturant plusieurs fois le bout de papier comme si tu ne savais plus écrire. « Décidément … Je dois avoir pris un coup sur la tête finalement … l'airbag en pleine poire c'est pas super agréable. » Tu dis ça comme si c'était pas la voiture en entière que ce type venait de se manger.

Plus tu reprends pieds dans la réalité, plus tu commences à avoir du mal a gérer les vagues de chaleur et la presse ce grossissante de l’entité au fond de toi. Si la transformation physique n'évolue plus, elle ne s'arrête pas non plus et vient lentement mais sûrement rogner dans tes réserves. Tu connais les effets, Icare, tu sais que ça ne peut pas bien finir.
C'est pour ça que tu veux régler ça vite et bien. Pour ça que tu ne traines pas en proposition et quand elle accepte de régler ça à l’amiable, tu soupires profondément. Le truc, c'est que lorsque tu cherches quelque chose pour la dédommager, tu te rends compte que tu n’as rien sur toi. Pas de papiers, pas de téléphone, pas de carte bancaire, et face a ça, la pression monte d'un cran.

“Je n’ai rien mais je vais vous rembourser les réparations, vous pouvez…”

Tu t'arrêtes avant de finir, parce qu'elle a le nez dans son téléphone et que, ça y est, le Dragon parvient à attraper un peu de force. La peur flambe. La colère aussi. Tu ne veux pas que ça atterrisse sur les réseaux sociaux, alors forcément, tu surreagis.

“Votre mari ? Tu marmonnes d'une voix plus grave a mesure que tu perds le contrôle. Vous n'arrêtez pas de taper des messages, vous lui faites un roman ou quoi ?”

Toi, tu es sûr qu'elle publie sur les réseaux. Qu’elle décrit l’accident et que ça va te retomber dessus. La chaleur te prend a la tête, et tu recules d'un pas, plus par instinct que par véritable volonté de fuir. Dans le brouillard rouge de la colère mythologique, tu la voix aller chercher de quoi noter, lentement, bien trop lentement. Elle écrit, rature, recommence et toi ça te fait complètement vriller. Alors quand elle te rappelle tout d’un coup qu'elle est victime aussi dans cet accident, tu te retrouves a serrer les deux poings le long de ton flanc, les épaules tendues.

“Vous avez besoin que je trouve une ambulance ? Tu grinces, sur un ton inquiétant. Jveux pas que vous fassiez un malaise ici.”

Tu veux pas qu’elle te reste sur les bras. Tu veux fuir, tout en la sachant en sécurité. Et tu vois, c'est tout le paradoxe de la situation, parce que toute ton attitude est sévère, dure, ton expression est fermée et mécontente mais tu ne veux pas son mal. Tu luttes avec le Dragon pour prendre soins d'elle avant de complètement vriller et devoir fuir à toute vitesse.
C'est dans cette attitude tout bonnement étrange, que tu vas vers elle, tends les mains et l’attrapes par les bras pour la stabiliser, le temps de savoir ce dont elle a besoin.

T’as sauté dans la voiture dès que l’adresse t’est parvenue. Dans la panique, t’as emporté tout ce que t'étais en train de préparer pour l’aider. Une trousse de secours, une arme à feu personnelle, des vêtements de rechange, un grand sac de sport, et une bâche. Ça va dans tous les sens dans ta tête et même si elle t’a finalement dit qu’elle avait tué personne, tu n’arrives pas tout à fait à imaginer la situation.
Sur le chemin, tu conduis comme un affreux connard. Tu grilles tout ce que tu peux, aucune limite de vitesse n'est respectée. Tu marmonnes comme un diable, un air effrayant sur le visage, tes doigts solidement serrer sur le volant tant et si bien que t'es jointures finissent blanches. Et pourtant, ce n’est rien en comparaison à L'expression que tu affiches quand tu arrives sur place. Tu vois d’abord la voiture, la fumée, les dégâts et une angoisse profonde déchire ton visage alors que tu piles dans un crissement de pneux. Mais alors, vieux, quand tu vois ce… monstre, se jette sur Joan et l’attraper avec une expression aussi mauvaise sur les traits, tu te transformes.

“Lache-la tout de suite !”

Ton ton est glaçant, au moins autant que ton regard, quand tu t’éjectes de l’habitacle, arme à feu déverrouillée et braquée sur l'inconnu sans aucune marque d’hésitation sur ton expression mauvaise.

“Tu t’écartes tout de suite, ou je te mets une balle dans la cervelle. Tu avances lentement vers eux. C'est une arme anti-mutant, tu feras pas long feu contre elle.”

Le type sursaute et relâche la brune d'un coup. Tu ne lui laisses pas le temps de reculer, ta main aggripe celle de la policière que tu tires sans ménagement contre ton flanc avant de la regarder rapidement des pieds à la tête.

“Il t’a blessé ? J'ai tout ce qu'il faut sans le coffre pour se débarrasser d'un corps, on peut toujours s’en servir, hein. Tu lances avec une œillade de tueur sur l'espèce de lézard humain.”

Bon. D'accord. Tu dois clairement donner l'impression que tu te payes sa tête avec tout ça, mais tu n'y peux rien, ton instinct est en alerte maintenant et il te souffle que ce monsieur, il essaie de se tirer un peu trop rapidement : dans ta tête de flic, c'est forcément qu'il a un truc à se reprocher. Il a l'air à bout de nerfs, et surtout, il est parano. Tu as beau balayer rapidement l'idée que tu sois en train de raconter tout ça sur les réseaux - c'est loin d'être ton genre - en plus, il insiste. Il s'imagine que tu mens. Et … c'est vrai en quelques sortes, c'est pas vraiment ton mari avec qui tu échanges des messages, c'est Clayton. Mais il n'empêche que ça change pas grand chose pour lui, ce sont des messages personnels, et privés.
« Vous, vous n'avez jamais été marié… » Tu répliques, en tentant de glisser un sourire. Tu continues dans ton pseudo mensonge, parce que tu te vois mal revenir en arrière, tu sais que ça passerait mal. Alors, à la place, tu en reviens à vos affaires, tu essaies de gagner du temps en prenant tes notes, mais là encore, c'est un comportement qui alerte ton interlocuteur.

Subitement, il a l'air de penser que c'est toi qui a un problème, et tu ne sais pas tellement comment prendre son comportement. Est-ce que c'est réellement de l'inquiétude sincère ? Tu as comme un doute, il y a ce petit quelque chose dans sa façon de se déplacer, et dans son regard, qui allument quelques signaux d'alarme en toi. Il y a un fond de menace chez lui …
« Non je vais bien. C'est pas mon premier choc, j'ai connu pire. » Un presque immeuble sur le coin de la tête il y a moins d'un mois, par exemple.
Tu ratures encore une fois, et ça suffit visiblement pour convaincre ton inconnu bizarre de s'approcher de toi, et de se permettre de poser les mains sur toi. Il attrape tes bras, sans violence, mais ça te surprends et au moment où tu ouvres la bouche pour lui demander de s'éloigner, une voiture déboule à toute vitesse, elle freine, les pneus crissent sur l'asphalte et la voix de Clayton se fait entendre dans la rue, sommant le méta aux yeux jaunâtres de te lâcher immédiatement.

Mais c'est pas le pire.
Lorsqu'il s'approche, tu vois clairement qu'il a carrément une arme au poing qu'il braque l'autre type, il le menace, et puis il te récupère en te tirant d'un coup dans sa direction pour te réceptionner. « Non … Non, mais ! Non. Je vais bien. Il ne m'a rien fait du tout, Clay, baisse ton arme ! » Il ne manquait plus que ça, tien. Non seulement tu l'as renversé, mais maintenant, voilà qu'il se retrouve avec un canon braqué sur la tête.
Doucement, tu te défais de l'étreinte de Clayton pour récupérer le bloc-notes sur ton capot de voiture et tu arraches la page sur laquelle, au milieu des ratures, se trouve écrit ton nom de famille et ton numéro de téléphone. « Tenez, on va … Appelez moi. » Tu prends un risque : celui qu'il décide de s'en aller, de balancer ton bout de papier et de tout oublier, dans ce cas, tu n'auras plus qu'à te débrouiller toute seule pour te payer une voiture neuve, ou les réparations de celle-ci. Mais il vaut mieux ça qu'un dérapage, non ?